« le plus grand de son siècle », écrit Thibaudet
5/5 L’Agrégation .
.----. Notre collègue, qui est déjà l’auteur d’une monographie sur Veuillot (rééditée en 2005 chez Téqui), propose pour le bicentenaire du grand journaliste (« le plus grand de son siècle », écrit Thibaudet) une anthologie qui n’existait pas encore : celle des textes de voyage (au sens large, car il y a des voyages dans Paris), à. quoi il ajoute des extraits critiques parfois très peu connus, non seulement sur Hugo, ou sur Polyeucte et Britannicus, mais sur Érasme, Dante, Shakespeare, Saint-Simon, Mme de Sévigné, Renan, Sainte-Beuve, Richepin, et à l’occasion sur la peinture (de Raphaël à Géricault, Courbet, Gustave Doré), ou sur la musique. C’est donc destiné au grand public cultivé, utilisant beaucoup la correspondance familière de Veuillot avec son épouse, son frère, sa sœur, ses amis. Entre les morceaux choisis, des textes de présentation permettent de lire ce livre comme une biographie. De l’Italie à l’Algérie (en 1841), et des Pyrénées à l’Alsace ou la Rhénanie, en passant par presque toutes les provinces françaises, le parcours est varié.
Mais c’est aussi un livre très pointu, dont les notes nous font pénétrer dans certains arcanes du XIXe siècle, et qui donne des pistes de recherche: non seulement il contient, en plus de ses propres index (patronymes et lieux), un index de la biographie de Louis Veuillot par son frère Eugène (4 volumes très riches, mais peu utilisables jusqu’à présent), mais encore il suggère que des corpus épistolaires de Veuillot restent à découvrir dans certains couvents, évêchés, familles (à commencer par celle de Guizot).
Enfin ce livre nous rappelle que Veuillot ne fut pas seulement un écrivain parisien, mais un reporter, comme on ne disait pas encore en France (il est allé interviewer Metternich à Bruxelles en 1849, Bernadette Soubirous à Lourdes en juillet 1858…), et il comporte plusieurs illustrations inédites : le portrait de Veuillot par Pilliard (1860), et diverses dédicaces dont l’une de son premier livre, en 1839: Les Pèlerinages de Suisse. [ Éric Georgin dans : L’Agrégation, n° 466, novembre-décembre 2013 ]
Anthologie / voyages,rencontres ...
5/5 Lecture et Tradition .
.----. [...] Pour souligner ces anniversaires, Benoît Le Roux a récemment publié Voyages et lectures, recueil de textes qu'il a choisi dans l'œuvre de Veuillot, accompagnés de commentaires. C'est une très intéressante anthologie des récits des nombreux voyages effectués par l'écrivain et de ses innombrables rencontres avec de multiples personnalités et célébrités de son époque. L'ensemble est passionnant et pour le réaliser, B. Le Roux a « repris un à un ses livres, brochures, papiers inédits et surtout ses lettres, pour reconstituer ses
itinéraires, retrouver ses impressions, parfois dans leur fraîcheur, parfois dans la mélancolie du souvenir… Et combien de rencontres ! ». Chronologie, cartes, notes et index permettent au lecteur de suivre le voyageur, ou de poursuivre ses recherches sur tel ou tel personnage. Un cahier d'illustrations mêle portraits, caricatures (Daumier, Gill, Nadar) et quelques documents autographes (...) [ Jérôme Seguin dans le numéro 32-NS - décembre 2013 de notre revue " Lecture et Tradition " ]
Louis Veuillot : Catholique d'abord !
5/5 Monde et vie 12 nov 2013.
Comment appeler cet opus ? Une anthologie érudite. C'est en tout cas un très beau livre sur LouisVeuillot que nous offre ce grand spécialiste qu'est Benoît Le Roux, un livre qui, par-delà le pamphlétaire et le partisan, nous fait découvrir l'homme et l'écrivain dans son époque, au milieu des gens, s'occupant lui-même de son petit intérieur (il est veuf à l'âge de 39 ans et perdra quatre de ses six filles), nous entretenant de sa brosse à dents, de son "madras" ou de la piètre cuisine du monastère de Solesmes. Ce qui intéresse d'abord le recenseur et l'historien ? C'est la correspondance. Celle qu'entretient ce champion du catholicisme antilibéral avec son frère Eugène, son compagnon, avec sa soeur Elise (qui veille sur lui au point de le priver de tabac), avec ses amis (parmi lesquels la comtesse de Ségur et sa famille, Juliette de Robersart, femme de lettres qui fut un de ses coups de coeur ou Charlotte de Grammont, "une jeune vieille fille de Versailles d'esprit vif et de coeur prompt"). Rien de ce qui est de son temps n'est indifférent à Louis Veuillot, qui se fait photographier par son ami Nadar, qui prend le train pour aller à Rome ou au Pouliguen (il aime nager), qui emprunte le vapeur pour se rendre en Algérie (il ramènera de ce voyage un livre et une véritable admiration pour le général Bugeaud).
Louis Veuillot apparaît d'abord comme un styliste éblouissant dans son négligé, un critique cruel mais qui souvent touche juste. Voyez ce qu'il dit de Théophile Gautier et de Son Roman de la momie : "La partie descriptive est souvent d'une remarquable dextérité ; un calque ne serait pas plus exact et un moulage en plâtre n'aurait pas plus de relief. Pour la couleur, M. Gautier y excelle ; je n'ai nulle part rien vu de plus égyptien ; le bleu et le vermillon surtout sont de première qualité. En somme M. Gautier est un bonpeintre de natures mortes, et tout au moins un excellent photographe."
Veuillot est d'abord un chrétien, comme en témoigne sa lettre à Madame Aupick, pour la mort de son fils, un certain Charles Baudelaire : "M.Asselineau m'apprenant qu'il avait demandé et obtenu les sacrements, m'a apporté une des joies les plus parfaites que j'ai goûtées. Je n'ai point songé à sa mort je n'ai vu que sa résurrection, et j'ai béni sans trop d'étonnement la grande miséricorde de Dieu. Dieu a souvent cette bonté d'écouter moins les paroles bruyantes par lesquelles les hommes se séparent de lui que les secrets gémissements du fond de l'âme qui lui demandent pardon." Merveilleusement dit !
<p align="right"> Joël Prieur <a href= http://www.monde-vie.com target=_blank> www.monde-vie.com </a>