Parce que les frontières ne sont jamais immuables, parce que les mentalités évoluent, parce que les guerres bouleversent l'ordre établi, l'histoire des pays est difficile à écrire. Chacun a ses particularités, ses contradictions, son mystère. Mais ce qui est vrai de tous les pays l'est encore plus de ce grand pays qu'est la Russie.
"La Russie, disait Churchill, c'est un mystère enveloppé dans une énigme."
En esquissant à grands traits les événements qui se sont déroulés, en dégageant les principales influences qui se sont exercées, François-Georges Dreyfus nous fournit quelques clés pour résoudre cette énigme.
La religion orthodoxe est la première de ces clés. C'est elle qui fait, depuis le IXe siècle, l'unité des Slaves de l'Est, en leur donnant une sorte de mission. Héritiers du vrai christianisme, ils doivent sauver le monde. Paradoxalement, le communisme athée, à partir de 1917, nous propose une version laïque de cet idéal de salut. Lui aussi est universaliste.
La deuxième influence, c'est l'autoritarisme politique, imposé par les invasions mongoles au XIIIe siècle. En intégrant la Russie à l'espace asiatique, en stoppant net son développement, elles sont à l'origine d'un retard économique qui ne sera jamais rattrapé.
Ni par les tsars modernisateurs. Ni par l'Etat marxiste-léniniste, qui gagnera certes la "Grande Guerre patriotique" mais dont la bureaucratie ne réussira pas à gérer l'agriculture ou l'industrialisation du pays.
Incapable de se réformer, le régime soviétique implose en 1991, et l'URSS disparaît, laissant la place à une Russie humiliée, désemparée, ramenée aux frontières du début du XVIIe siècle.
Mais les histoires les mieux écrites nous apprennent que l'Histoire n'est jamais écrite. Qui peut dire ce que sera la Russie de demain ?