Un nouveau chantier pour Jean-Marc Ayrault
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.----. Pierre Péan s’intéressait à ce qui se passait à Paris et dans le monde, mais également à ce qui s’était déroulé dans le pays de Châteaubriant pendant la période révolutionnaire. C’est ce que nous découvrons dans Mémoires impubliables (Albin Michel).
Avant de mourir en juillet 2019, Pierre Péan avait travaillé à l’élaboration d’un « livre -testament » composé à partir de notes accumulées en quarante ans de carrière de journaliste enquêteur. 153 chapitres composent donc Mémoires impubliables ; il y est question de Mitterrand, de Chirac, de Plenel, d’Omar Bongo, de Barril… Mais aussi d’un peu d’histoire de Bretagne, car la mère de Péan était originaire du pays de Châteaubriant et sa famille a vécu les épisodes sanglants de la Révolution. En effet, pendant la Convention, les troupes républicaines s’y livrèrent à nombre d’exactions (exécutions, viols, tortures) et destructions. Péan a donc consacré un livre à cette histoire familiale (Les Chapelières, Albin Michel).
« C’est par principe d’humanité que je purge la terre de la liberté de ces monstres »
Au cours de ses recherches, il a trouvé un courrier que le sinistre Carrier a envoyé le 18 frimaire an II (19 décembre 1793) à la Convention, décrivant les flots de sang à la fin de la virée de Galerne : « Vous avés décrété qu’il n’existait plus de Vendée, vous décrétérés bientôt qu’il n’existe plus un seul brigand. L’affaire du Mans a été si sanglante, si meurtrière pour eux que depuis cette commune jusqu’à Laval la terre est jonchée de leurs cadavres […] Le deux dans Ancenis avec peu de forces par deux portes opposées, ils ont fait une boucherie épouvantable des brigands, les rües de cette commune sont jonchées de morts, ils n’ont pas perdu un seul homme, nous n’avons eu qu’un blessé […]. Le 29 au soir, Westermann s’est emparé des Touches, où il a massacré 300 ou 400 brigands […]. La défaite des brigands est si complette que nos postes les tüent, prènent et amènent à Nantes par centaines ; la guillotine ne peut plus suffire, j’ai pris le parti de les fusiller. […] J’invite mon collègue Francastel à ne pas s’écarter de cette salutaire et expéditive méthode, c’est par principe d’humanité que je purge la terre de la liberté de ces monstres […]Vive, vive la République, encore quelques jours et il n’existera plus un seul brigand sur les deux rives de la Loire. »
Déverrouiller le débat ?
Bizarrement, en Loire-Atlantique, personne ne semble s’intéresser à cet épisode qui est loin d’être anodin. Ni les élites, ni les homme politiques ne font mention de cette boucherie qui s’est déroulée chez eux. Pourtant il y aurait beaucoup à raconter… Et un personnage important semble le mieux placé pour saisir à bras le corps cette question : c’est Jean-Marc Ayrault. Désormais retraité de la politique, il se consacre à une cause noble en tant que président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage.
Une seconde lui conviendrait parfaitement : la mémoire des massacres perpétués par les troupes républicaines en Loire-Atlantique pendant la Convention. Ayrault sait ce qu’il convient de faire : « Anneaux de la mémoire », « Mémorial », « Musée d’histoire »… N’a-t-il pas déclaré : « Dire la vérité, c’est assumer l’histoire » (Presse Océan, mardi 16 juin 2020) ; « Je veux qu’on présente toute l’histoire, pas seulement une partie » (Ouest-France, mardi 16 juin 2020). Puisqu’il faut, selon lui, « déverrouiller le débat » à propos de l’esclavage, il pourrait également songer à la « déverrouiller » pour la période révolutionnaire [ Signé : Bernard Morvan le 16 / 07 /2020 ]