Né à Moscou, de père vaudois et de mère russe, élevé en Suisse, naturalisé canadien mais résident guadeloupéen, Pierre Dudan était prédestiné à devenir, par son goût du paradoxe, une vedette française de la chanson.
Ayant franchi le cap de la soixantaine, l'auteur du "Café au lait au lit", de "Clopin-Clopant", de "Mélancolie" et de bien d'autres airs à succès, se penche, aujourd'hui, avec quelques inévitables "Trous de mémoire" sur son passé.
L'existence folle et tumultueuse qu'il a menée fait de lui un personnage digne d'un roman de Balzac ou d'Alexandre Dumas. Tour à tour trompette de jazz, clochard, journaliste, pianiste de bar, acteur de théâtre et de cinéma, animateur de radio et de télévision, compositeur, romancier et pamphlétaire, Pierre Dudan a connu avec la même sérénité, la célébrité et l'oubli, la fortune et la misère, l'amour fou et la sagesse, la santé et les affres d'un mal incurable. Rien ne saurait altérer l'optimisme et l'enthousiasme de ce baladin, éternel enfant sans âge, qui reste comme l'a si bien dit son ami Georges Brassens "l'incorruptible de ses débuts" et qui repart, courageusement, après dix-sept ans d'absence, à la conquête de Paris avec une moisson de chansons étincelantes de jeunesse et ce recueil de souvenirs passionnants.
"Trous de mémoire" n'est pas seulement un livre qui fourmille d'anecdotes pittoresques sur le monde du spectacle de ces quarante dernières années. C'est aussi un document tout à fait exceptionnel sur la vie quotidienne en Europe de 1917 à 1946. Vagabond peut-être insouciant mais observateur lucide, Pierre Oudan dépeint dans cet ouvrage la fin de l'époque tsariste à Moscou, le Berlin des années folles, l'envoûtement des paysages lapons et les inquiétudes de la Suisse au cours de la seconde guerre mondiale.
Ecrit avec tendresse, humour et souvent même avec une émotion discrète, "Trous de mémoire" révèle que Pierre Dudan est aussi un écrivain d'une rare sensibilité, doté d'un surprenant pouvoir d'évocation. Son livre est un rayon de soleil qu'il offre, dans l'automne de son existence, à tous ceux qui auraient encore bien tort de désespérer de la vie.