Orgueil et préjugés .
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.----. M. et Mme Bennett ne forment pas un ménage assorti. Madame Bennett est aussi sotte que son mari est fin. Elle est de surcroît exubérante et bavarde au point d’en être inconvenante, ce qui n’est pas rien dans l’Angleterre de la fin du XVIIIè siècle. Lassé par ce flot ininterrompu, M.Bennett se réfugie dans sa bibliothèque et laisse ses cinq filles gérer leur mère.
Les Bennett auront longtemps espéré un garçon qui aurait pu hériter du domaine, en vain. Sur les cinq filles, l’auteur en distingue deux : la belle et calme Jane et sa cadette, Elizabeth, qui ressemble à son père, l’énergie en plus.
Malgré leur train de vie modeste, les jeunes Bennett fréquentent la bonne société de cette chic campagne anglaise. Au cours d’un bal, un nouveau venu, le beau et riche Darcy, semble écraser l’assemblée de sa morgue. Il danse peu, parle moins encore et observe, Elizabeth surtout. L’ami de Darcy, Bingley, jette son dévolu sur Jane, mais de façon plus classique : il parle, sourit et danse.
Darcy et Elizabeth se revoient souvent, et la jeune fille n’envisage pas de s’attacher à celui qu’elle prend pour un fat. L’orgueil de l’un et les préjugés de l’autre compromettent gravement ce qui aurait pu être une belle idylle romantique.
La célébrité de Jane Austen va croissante. Elle est beaucoup lue et étudiée, d’avantage qu’une George Eliot dont les romans me semblent pourtant plus accomplis. Mais il faut remettre les œuvres dans leur chronologie et, de ce point de vue, Jane Austen est un précurseur. Ses romans sont d’une grande modernité pour son époque et se lisent avec plaisir malgré quelques clichés qui n’échappent pas au lecteur du XXIè siècle.
Mais si George Eliot, Thomas Hardy ou Henry James ont écrit de grands romans, c’est notamment parce qu’ils ont lu Jane Austen qui les a, d’une certaine façon, formés. [ Publié le 12 janvier 2020 par Antoine de Lacoste sur son blog ]
Persuasion .
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.----. Anne Elliot « avait été une très jolie fille, mais son éclat s’était évanoui de bonne heure ». Il y a une raison à cela. Amoureuse d’un officier de marine désargenté mais sûr de son avenir, elle s’est laissée « persuader » de ne pas l’épouser. Sa mère est morte, son père affligeant (« La vanité était le commencement et la fin du caractère de Sir Walter Elliot. ») et ses deux sœurs « de valeur bien inférieure ». Elle s’en était remise au jugement de Lady Russel, qui fut une grande amie de sa mère. Consciente de la valeur morale et intellectuelle d’Anne, elle jugea qu’un meilleur mariage serait un jour possible.
Huit années ont passé et, à 29 ans, Anne cache sa mélancolie par un comportement gai, irréprochable et dévoué à une famille peu aimante. La vie se passe au château, entre petites mondanités et souci d’argent liés à la mauvaise gestion paternelle. La situation devient critique, il faut louer le château et s’installer à Bath dans des conditions plus modestes mais dans une ville très bien fréquentée.
C’est alors que l’ancien fiancé revient. Le capitaine Wentworth a fort bien réussi mais regarde Anne avec rancœur. La jeune femme s’efforce d’oublier ses sentiments. Puis un cousin arrive, Sir William Elliot, le futur héritier du château. Il est riche, d’une exquise politesse et fait une cour pleine d’à propos à Anne. Lady Russel verrait ce mariage d’un bon œil. Un troisième homme semble également s’immiscer dans la vie de la jeune femme, le capitaine Benwick. Officier de marine également, il apprend la mort de sa fiancée au retour d’un long voyage. Inconsolable, il trouve en Anne une oreille attentive et passe de longs moments avec elle à parler de la souffrance. La station balnéaire bruisse de rumeurs.
Ce dernier roman de Jane Austen (sa parution fut posthume) est un des plus accomplis. La peinture sociale qui lui est si chère alterne avec bonheur entre sensibilité et ironie mordante : « Ce n’était qu’une soirée de jeu, où se côtoyaient des gens qui ne s’étaient jamais vus et des gens qui ne se voyaient que trop…une réunion banale, trop nombreuse pour être intime, trop restreinte pour être variée. »
Les personnages sont toujours campés en quelques traits précis, puis leur comportement, amoureux ou social, décrit avec beaucoup de finesse et de profondeur. Il faut savourer au calme les romans de Jane Austen car chaque phrase compte.
Le cinéma s’est un peu trop emparé de son œuvre et lui fait souvent perdre une partie de sa subtilité. Comme pour Le Guépard, Autant en Emporte le Vent ou Le Docteur Jivago, un retour à la source s’impose.
[ Texte publié le 6 septembre 2020 par https://leslivresdantoine.com/ - Blog que nous conseillons particulièrement et que l'auteur définit ainsi : Ce blog a une seule ambition : faire partager les lectures qui, depuis plusieurs décennies, m’ont ému, enthousiasmé, impressionné par leurs qualités historiques ou, surtout, littéraires. ]