"Tout y respire l'ordre, la clarté, l'intelligence ...
5/5 Plaisir de Lire .
.----. Judith Cabaud est juive américaine et vit à Brooklyn . Elle passe une jeunesse tout à fait malheureuse sur le plan spirituel . Très intelligente, tenace, elle est une voix de cette élite rarissime qui remet en question chaque aspect de l'éducation ou de l'enseignement . On songe tout de suite à Edith Stein ou à Simone Weill : soif d'absolu, de vérité, que son milieu juif agnostique étouffe et asphyxie . La musique, Bach en particulier, lui montre, sotto voce, qu'il existe autre chose que la vie physique et la réussite matérielle . Ses études universitaires et une rencontre providentielle l'amènent à partir pour la France où elle découvre l'art ogival, Wagner, Pascal, puis le catholicisme . Son mentor qui a découvert quel trésor est cette jeune fille, lui propose de l'épouser, idée qu'elle n'accepte qu'après sa conversion au catholicisme .
Elle souffre affreusement de la réaction révoltée de sa mère, revient aux USA pour l'obtention de son diplôme . Elle est tellement meurtrie par sa famille qu'elle passe une année de solitude hallucinante et repart enfin pour toujours en Europe . C'est le baptême, le mariage et 9 enfants couronnent cette union . Le ménage a pris en main une exploitation agricole et, chaque été, représente du Molière devant tout le voisinage enchanté . Ils sont tous musiciens, artistes, et leur foyer est une véritable lumière pour ce coin de l'Allier où ils vivent . La crise de l'Eglise les inquiète mais ils savent aborder chaque problème avec calme, courage et une lucidité sans faille .
Judith Cabaud pose la même question que Julien Green, l'Abbé Bryan Houghton ou l'abbé de Montgoméry : "Pourquoi nous sommes-nous convertis ?" L'Eglise marche tous freins levés vers le protestantisme . Douloureuse interrogation de ces êtres qui viennent des églises schismatiques ou hérétiques et ne souhaitent guère, après avoir découvert la Vérité dans une joie parfaite, repartir dans l'erreur ou le syncrétisme .Le Père Bruckberger déclare que ce livre est un "Douanier Rousseau de l'autobiographie". Tout y respire l'ordre, la clarté, l'intelligence que donne une foi profonde .
Il n'y a rien de plus délicat, pudique que la confession de cette femme qui ne critique jamais comme un Hervé Bazin ou une Simone de Beauvoir . Elle ne renie rien mais analyse merveilleusement ce qui manque à la religion judaïque, qui s'est accomplie dans la religion catholique . Ce livre est à conseiller dès 15 ans et à mettre dans toutes les mains . [ " Plaisir de Lire " , numéro 72 , grandes vacances 1986 ]