Dès 1992, William Clinton a placé la promotion des exportations au rang des priorités nationales, parce qu'elles contribuent de plus en plus à la croissance économique et qu'elles permettent de créer des milliers d'emplois, généralement bien payés. Quant à G. W. Bush, il affirmait, avant d'être élu, vouloir rétablir le leadership commercial des États-Unis.
La compétition s'est intensifiée en matière économique à un tel point qu'on parle aujourd'hui de "guerre économique". Celle-ci peut se définir comme conflit entre groupements organisés en vue d'accroître leur puissance, leur part de marché, et le bien-être de leurs sujets, en sachant que ce qui est gagné par les uns est perdu pour les autres, tous les moyens étant requis pour atteindre ces objectifs, exception faite de la confrontation physique immédiate et sanglante entre les pays du bloc occidental ou dans leur mouvance.
Pour leur expansion, les États-Unis appliquent une stratégie dite "intégrale" parce qu'elle ne s'applique pas qu'à la chose militaire. "Elle a pour but d'accomplir l'ensemble des fins définies par la politique générale", en manoeuvrant les "forces de toutes natures, actuelles et potentielles, résultant de l'activité nationale". Elle se subdivise en stratégies économique, culturelle et militaire. La politique générale se résume en quelques mots : recherche de la puissance et de la prospérité. La stratégie économique assure le développement par l'ouverture des marchés et l'exportation. La stratégie culturelle promeut les valeurs et les produits américains. Elle est le support indispensable des deux autres stratégies, économique et militaire. La stratégie militaire assure non seulement la défense des intérêts vitaux, mais elle bénéficie également à l'économie grâce aux subventions, à l'exportation de matériels de guerre et au contrôle des flux stratégiques. L'interventionnisme suppose l'entretien d'une machine de guerre performante tout en contribuant au rayonnement d'un peuple qui a incontestablement du génie.
La dyarchie française (depuis que la cohabitation est devenue le mode d'exercice "normal" du pouvoir, avec le Président d'un côté, et le Premier ministre de l'autre), s'oppose quant à elle à toute vue d'ensemble. On voit mal comment il serait possible de coordonner l'action du quai d'Orsay, de Bercy et celle du Ministère de la Défense lorsque les composantes du pouvoir se font de petits procès pour discréditer l'adversaire et prouver son incompétence.
Ce livre, très documenté, est une réflexion originale et nouvelle sur les problèmes les plus sensibles de l'histoire d'aujourd'hui.
Jean-François Tacheau, juriste et officier de réserve de la Gendarmerie nationale, est diplômé de l'Institut Supérieur des Affaires de Défense (ISAD).