Lentement les groupes se dissipent, les soldats de l'escorte anglaise s'éloignent. Prêtres, juges, assistants divers, la foule commence à se disloquer, avec ici et là des murmures. On entend un secrétaire du roi d'Angleterre, Jean Tressard, dire : "Nous sommes tous perdus, car c'est une bonne et sainte personne qui a été brûlée."
En ce 30 mai 1431, sur la place du Vieux-Marché à Rouen, le rideau tombe sur la fulgurante aventure de Jeanne d'Arc. Vu d'aujourd'hui, tout nous paraît alors joué ; pour la tradition populaire, Jeanne a "bouté les Anglais hors de France" et "mis fin à la guerre de Cent Ans". En réalité, il faudra vingt-cinq ans pour que sa mission s'accomplisse, pour que l'impulsion qu'elle a donnée en quelques mois aux événements aille jusqu'à son terme. Réconciliation des Armagnacs et des Bourguignons, "recouvrement de Normandie", reconquête de la France : tout ce que Jeanne avait annoncé se réalise entre 1431 et 1456.
Mais ces vingt-cinq années voient aussi l'avènement du premier poète moderne, François Villon, de la première favorite royale, Agnès Sorel, du premier homme d'affaires, Jacques Coeur - elles voient encore la fin de la chevalerie, la fin de l'université médiévale et même la "fin du Moyen Âge", avec la chute de Constantinople en 1453. L'Histoire salue à sa manière le passage-éclair de Jeanne dans le ciel de France.
1456 est enfin l'année de la Réhabilitation officielle de Jeanne d'Arc. Réhabilitation qui efface la honte du procès de Condamnation.
Régine Pernoud, spécialiste mondialement connue de Jeanne d'Arc, consacre pour la première fois un ouvrage à cette période capitale de l'immédiat "après-Jeanne".