Ces causes de canonisations qui n'ont pas abouti
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.----. En dépit de ce que peuvent penser les adversaires de l'Église et malgré quelques béatifications ultra-rapides médiatisées ces dernières années, rien de plus sérieux, de plus exigeant, de plus sévère que les procédures de canonisation telles que Rome les a fixées. Ne devient pas saint n'importe qui ni n'importe comment et l'abondance soudaine de nouveaux bienheureux au calendrier depuis le pontificat de Jean-Paul II ne doit pas abuser : le dicastère en charge des causes des serviteurs de Dieu n'a pas rabattu grand-chose de ses rigueurs anciennes.
Rien d'étonnant, alors, si de nombreux dossiers, ouverts avec plus ou moins d'enthousiasme et plus ou moins de publicité, sombrent dans l'oubli, façon élégante de dire qu'ils n'ont pas convaincu Rome ou que quelque difficulté, qu'il est inutile d'étaler sur la place publique, a bloqué la cause. Ainsi en est-il allé de quelques personnalités très connues que journalistes et politiques avaient, de leur vivant, et après leur mort, gratifié d'une auréole prématurée, et dont une étude approfondie des faits et gestes a démontré qu'ils ne la méritaient pas .
Curieusement, Jérôme Ancibero, (Presque saints ! Canonisations ratées et autres causes difficiles, Tallandier, 270 p.), - mais peut-être s'agit-il d'une forme suprême de discrétion . - n'a évoqué aucune de ces figures célèbres et finalement décevantes que, par charité, je ne citerai pas non plus. Il ne s'est intéressé qu'à des personnalités aujourd'hui assimilées aux idées de droite et admirées par les milieux traditionalistes .
Vous découvrirez ainsi que le malheur d'Isabelle la Catholique est moins sa politique d'expulsion des juifs espagnols que la faveur dont sa mémoire a joui à l'époque franquiste ; que Christophe Colomb, dont le dossier fut jadis écarté, faute pour son postulateur d'avoir pu prouver la validité de son second mariage, est aujourd'hui coupable d'avoir été un abominable colonialiste, comme l'actualité récente nous l'a rappelé ; que Louis XVI, et presque tous les martyrs de la Révolution, reste une pierre d'achoppement entre la république française et le Vatican ; que Pie XII, que personne n'ose plus, de bonne foi, accuser d'antisémitisme ou de lâcheté sur la question juive, incarne une vision de l'Église avec laquelle certains aimeraient en finir une fois pour toutes, et que sainte Philomène n'a, bien entendu, jamais existé, sinon dans l'esprit d'intégristes au front bas et aux idées étroites qui s'obstinent à placer sous son patronage leurs chapelles et leurs écoles . Cette vision un peu trop systématique finit par agacer, et puis, l'on regrettera que tout cela ne dépasse jamais le niveau d'un article de vulgarisation grand public.
<p align="right">Anne Bernet dans culture le 20 septembre 2020 pour L'Homme Nouveau <a href= http://www.hommenouveau.fr/ target=_blank>www.hommenouveau.fr</a>