Comment sauver la paix mondiale ?
5/5 https://www.laselectiondujour.com/
.----. Vladimir Fédorovski est un personnage étonnant. Influent diplomate sous Gorbatchev, porte-parole de la Perestroïka, impliqué au premier plan dans le processus de sortie de la Russie du communisme jusqu’à Eltsine, il est l’écrivain d’origine russo-ukrainienne le plus édité en France, auteur de divers best-sellers, et dernièrement du livre « Poutine, l’Ukraine : les faces cachées ».
Observateur attentif et inquiet de la crise ukrainienne, suivant de près les analyses d’Henry Kissinger, Hubert Védrine, Henri Guaino et Jean-Pierre Chevènement partageant les mêmes convictions, il considère qu’il y a urgence à agir si l’on veut éviter une catastrophe géopolitique et cet « ouragan économique dévastateur » qu’annonce Jamie Dimon, patron de JP Morgan Chase, la plus grande banque américaine. Or, selon Fédorovski, il n’y a que trois issues à cette crise.
La première hypothèse, c’est la guerre mondiale. Elle n’a jamais été aussi proche selon plusieurs experts chevronnés, parce qu’il n’y a aucun accord, aucun contact sérieux, chacun développant sa logique sans regarder celle de l’autre. Même au plus fort de la guerre froide, il y avait des contacts continus entre les deux blocs. En 1962, lors de la crise de Cuba, le secrétaire d’Etat américain, Robert McNamara témoignait que chacun avait la préoccupation de sauver la face et de trouver un compromis, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. En outre, il y a soixante ans, la guerre faisait peur : « La clé de tout cela, c’est que nous avions tous connus la guerre ». Aujourd’hui, les dirigeants américains disent publiquement qu’ils veulent que la Russie ne se relève pas, ou du moins que Poutine soit éliminé du jeu et la propagande en rajoute. Dans le contexte actuel, c’est l’escalade assurée. Comment revenir à la raison ? Quels sont les autres options ?
La deuxième hypothèse, c’est que les sanctions drastiques parviennent à faire reculer la Russie. Certains avaient menacé de détruire l’économie russe. Pour l’instant, on est loin du résultat escompté. Il y a quelques jours le Guardian expliquait que la Russie était en train de gagner la guerre économique. La hausse du prix du gaz et du pétrole procure à la Russie 30% de recettes en plus par rapport à l’an passé. Les répercussions des sanctions ne paralysent pas le pays qui n’oublie pas que, sous Poutine, les revenus ont été multipliés par 10 par rapport à l’ère Eltsine. Avec les sanctions, on peut s’attendre à plus de 15% d’inflation et à une baisse du pouvoir d’achat mais les Russes ont enduré bien pire ! En outre, les événements actuels poussent à la réindustrialisation de la Russie, à la fin de sa dépendance au gaz et au pétrole, et à la mise à bas du système oligarchique, très impopulaire : actuellement 2% des russes possède 50% des richesses. La Russie, c’est un septième du globe ; ils ont eu 25 millions de morts victimes du goulag et de guerre civile ; 27 millions de morts par les nazis : ils ont déjà connu l’Apocalypse et penser qu’ils vont céder à cause de quelques sanctions, c’est risible.
Les Américains disent vouloir sans cesse accentuer la pression mais c’est une erreur capitale qui aura des répercussions gigantesques. Tout cela va provoquer une terrible famine en Afrique, une crise en Allemagne et dans d’autres pays d’Europe centrale, très dépendants du gaz et du pétrole russe, et finalement une forte récession dans le monde, y compris aux États-Unis. À ce moment-là, peut-être, les Américains changeraient de stratégie mais il serait trop tard. En attendant, le dindon de la farce c’est l’Europe, divisée, vassalisée, soumise à l’OTAN ; le gagnant c’est la Chine. Forte de liens resserrés avec la Russie qui est jetée dans ses bras, elle pourrait dominer une grande coalition anti-occidentale à laquelle le monde musulman ne serait certainement pas insensible.
La troisième option, la seule raisonnable, c’est d’agir le plus rapidement possible en faveur d’une véritable négociation. C’est l’urgence exprimée par Fédorovski, Kissinger, Védrine, Guaino et d’autres conseillers expérimentés qui soutiennent Emmanuel Macron dans sa volonté de ne pas interrompre les contacts réguliers avec Poutine. Tous insistent sur la nécessité d’aller vite car plus il y aura de destructions, d’exactions et de morts, plus il sera difficile de revenir en arrière. La base de cette négociation existe déjà en partie grâce aux Israéliens qui ont fait avancer le dossier : l’Ukraine accepterait un statut neutre, qui serait garanti internationalement par le Conseil de sécurité de l’ONU, la langue russe serait reconnue de même que l’ukrainien, il y aurait échange de prisonniers et le problème de la souveraineté sur la Crimée et le Donbass serait reporté à plus tard, et accepté en attendant comme un état de fait. L’attitude juste est celle que demande Emmanuel Macron : pas d’exclusion, pas d’humiliation, désescalade, pas de solution militaire. Avec un peu de bonne volonté il serait possible d’aboutir rapidement dans l’intérêt de tous, en premier lieu du peuple ukrainien qui va avoir besoin d’un plan Marshall. Comment sauver la paix mondiale ? « Au nom de nos enfants et petits-enfants, il est urgent d’agir » dit Vladimir Fédorovski, mais ceux qui ont les clés de tout cela entre leurs mains l’entendront-ils ?
[ Présenté Par Olivier Bonnassies - Publié le 06 juin 2022 ]
PS : Nous voulons être "les archivistes du temps présent" : LSDJ (la sélection du jour) est née du partage de cette idée que nous n'arrivions plus à suivre l'actualité de manière raisonnable : trop d'infos, trop de broutilles, trop de temps perdu... alors que celui-ci nous est compté ! Nous avons donc cherché avec quelques amis à sélectionner pour notre usage personnel les meilleurs articles de la journée et puis nous avons décidé de lancer quelque chose à plusieurs.
Un livre de remplissage ?
3/5 https://www.breizh-info.com/
.----. Mouaih ! Ca sent quand même la bonne opportunité de la part d’un éditeur qui regarde BFMTV…
Vladimir Fédorovski, le Russe préféré des plateaux télé, a donc sorti « Poutine l’Ukraine les faces cachées » dès avril dernier. Au regard des délais d’écriture et d’impression, on sait à quoi s’attendre. Car ce livre parle un peu de Poutine, à peine de l’Ukraine et surtout beaucoup de Staline. Fédorowski avait-il des vieux écrits à recycler ?
En fait, prétendant présenter le processus historique qui amène à Poutine, Fédorowski ne nous amène pas plus d’éléments qu’une page Wikipedia. Au bout de 150 pages en gros caractères, l’auteur a même dit l’essentiel de ce qu’il avait à dire mais l’éditeur a trouvé le moyen de rallonger la sauce en ajoutant le discours d’entrée en guerre de Poutine le 24 février dernier, un article de JC Buisson paru dans le Figaro ainsi qu’un texte sur « La Nation Russe trinitaire » écrit par Jean-Paul Lefèbvre-Filleau. Et, finalement, ce sont peut-être ces trois derniers écrits qui sont les plus éclairants.
Reconnaissons à l’auteur franc-russo-ukrainien une qualité : dans ce livre, il reste dans un certain équilibre. Loin de Poutinolâtres, des Dombassophiles et des Ukrainidiots, Vladimir Fédorovski passe le message à nos cerveaux occidentaux habitués à plaquer une grille de lecture des évènements simpliste et européennes sur des situations non-européennes : dans cette affaire tout le monde à ses raisons, Ukrainiens comme Russes. Il n’y a pas de méchant et de gentil, mais un ensemble de raisons nationales, nationalistes et politiques. La guerre, c’est souvent cela : deux logiques, deux raisons, deux intérêts qui s’affrontent. Et les USA au milieu ?
Dans cette guerre entre l’Ukraine et la Russie, à chacun de choisir son camp. Ou de s’en foutre.
[ Breizh-info le 31 août 2022 )
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