Impossible à réformer ?
5/5 La Nouvelle Revue d’Histoire .
.----. La question scolaire et universitaire a agité la IIIe République pratiquement dès ses
débuts. Un consensus sur une réelle amélioration se dégage dans les années 1930,
avec des penseurs comme Paul Crouzet, Hubert Bourgin, Serge Jeanneret, mais aussi
Gustave Le Bon, Edmond Demoulins et Georges Berner (école des Roches). En 1940, le
terreau était donc favorable à une refonte totale d'un système déjà sclérosé. Mais,
essentiellement par manque de sens pratique, le régime de Vichy échouera à réaliser
les réformes nécessaires, en dépit des discours et des intentions affichées. Cette
étude très fouillée examine les raisons et les conditions de cet insuccès, entre
« revanchisme cléricaliste », anti-intellectualisme militant (Abel Bonnard) et volonté de
rénovation totale d'inspiration collaborationniste (Marcel Déat). Un livre qui aide aussi
à comprendre pourquoi, aujourd'hui encore, le système éducatif français semble
impossible à réformer. [ Signé : Emma Demeester dans " La Nouvelle Revue d’Histoire ", n° 69, novembre-décembre 2013 ]
La question scolaire de 1940 à 1944 !
5/5 Politique Magazine N° 122 Oct 2013
C'est peut-être le titre qu'il conviendrait de donner à l'étude très fouillée qu'Yves Morel a faite des différentes personnalités qui se sont succédé entre 1940 et 1944 à l'Éducation nationale ou à
l'Instruction publique, selon les dénominations employées, avec, d'ailleurs, un sens particulier, ainsi que des nombreux plans de réformes proposés dans la même période ou, pour la plupart d'entre eux, seulement théorisés, tant les temps se prêtaient peu à la réalisation d'une véritable refondation, mais beaucoup plus aux discours, aux intentions affichées et aux vastes considérations de principes.
Le maréchal Pétain s'intéressait, dès l'avant-guerre, à l'école, et avait frayé avec les membres du cercle Fustel de Coulanges qui était issu de la mouvance d'Action française. La question scolaire et universitaire avait agité les élites françaises sous la IIIe République et presque dès ses débuts : le système déjà sclérosé était critiqué par les meilleurs experts et de toutes les tendances.
Le livre présente ici des figures intéressantes de vrais penseurs, tel un Paul Crouzet, un Hubert Bourgin, un Serge Jeanneret ou des esprits originaux capables de conceptions novatrices comme Gustave Le Bon, Edmond Demolins et Georges Bertier avec leur école des Roches.
Tant d'idées auraient pu aboutir, mais le drame de Vichy fut l'impossibilité pratique dans laquelle se trouvaient ses gouvernements de mettre en oeuvre dans la continuité un choix politique fort. Il fut soumis successivement, et souvent contre le sentiment du maréchal, à des influences diverses et contradictoires : soit, d'un côté, des tendances réactionnaires qui avec d'honnêtes visées réglaient trop de comptes avec le passé, se contentant d'intentions morales et pieusardes, soit, de l'autre côté, de chimériques prétentions de rénovation, d'inspiration tota litaire, et inconcevable en France. Des Rivaud, des Mireaux, des Ripert, des Chevalier, tous consciencieux, laisseront la place à des Carcopino et à des Bonnard qui eux-mêmes seront jugés insuffisants par les collaborationnistes acharnés.
Il se dégage de ce livre une impression de tristesse, car après-guerre tout recommencera et les débats actuels ne sont que la suite de cette impuissance à réformer, indéfiniment éprouvée jusqu'à Peillon lui même. Faudra-t-il l'effondrement du système pour réaliser enfin de libres refondations ?
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Une mine de documentation pour tous les curieux !
5/5 Les 4 vérités N°908 Vendredi 13 septembre 2013
Yves Morel est un spécialiste réputé des questions scolaires - et un spécialiste fort peu politiquement correct. Il a, en particulier, le courage de s'intéresser à des questions que personne n'ose plus traiter. C'est le cas de son tout dernier ouvrage intitulé "Pétain et l'école. Théories et réalités". On y découvre une mine de renseignements sur les relations entre l'État français (et les diverses "chapelles" politiques gravitant autour) et l'école. Le lecteur prend ainsi connaissance de débats d'une remarquable richesse - malgré une période qui ne se prêtait guère aux réformes scolaires. Et aussi d'une pratique très éloignée des débats. Une mine de documentation pour tous les curieux !
<p align="right">Les 4 Vérités <a href= http://www.les4verites.com/ target=_blank>www.les4verites.com</a>
A lire
5/5 Présent N°7930 Mercredi 4 septembre 2013
Les clichés sur l'Etat français ont la vie dure. Ainsi a-t-on tendance à laisser croire qu'il fut régi par une pensée monolithique et "géré" par des hommes d'accord sur tout et oeuvrant tous dans la même direction. Il n'en fut rien. L'Etat français fut traversé par des courants nombreux tirant dans leur sens à hue et à dia et, dans bien des cas, antagonistes et rivaux (pour ne pas dire ennemis). Ainsi en alla-t-il de l'Instruction publique, par exemple. On oscille, sur le sujet, entre des pamphlets exacerbés qui fustigent une politique de l'école conservatrice, réactionnaire, passéiste, et des écrits angéliques louant l'oeuvre du "bon Maréchal" à l'image de son effigie grand-paternelle sur les bons points distribués à nos chères têtes blondes. Comme souvent, la vérité est ailleurs. C'est ce que Yves Morel dans son ouvrage (le premier de ce genre et de cette ambition), Pétain et l'école. Théories et réalité 1940-1944, montre de façon très documentée. Loin des outrances d'un Jean-Michel Barreau (Vichy contre l'Ecole de la République, Flammarion, 2000) et des favorinos laudateurs des dévots d'Abel Bonnard. Yves Morel écrit : "La thèse de la prééminence du caractère rupteur et anti-démocratique de la politique scolaire de Vichy et celle, antinomique, de la prépondérance de la continuité historique sur la rupture, imposent l'une comme l'autre une vision globalement unitaire et spécieuse de la politique éducative de l'Etat français. Or, cette unité n'a pas existé : en quatre ans se seront succédé, en matière scolaire comme en d'autres domaines, un Vichy réactionnaire, un Vichy pragmatique, souple, nuancé, de compromis, et un Vichy collaborationniste incapable d'accoucher, autrement qu'en paroles, d'une politique originale."
A lire, notamment, le chapitre consacré à Abel Bonnard, personnage insaisissable souvent, caricaturé sans doute, mais indéniablement caricaturable. Il fut néanmoins celui qui esquissa - car cela ne fut jamais réalisé - la mise en place d'une école véritablement conforme aux objectifs avoués de la Révolution nationale. L'avènement de l'Etat français aurait pu permettre l'édification d'un nouveau système éducatif. "Or, écrit Yves Morel, aucun changement de grande ampleur ne s'est produit (... ). [Le pouvoir pétainiste], soucieux d'une moralisation propre à le faire accepter d'une opinion demeurée au fond républicaine et inclinant de plus en plus à la Résistance, a conservé la totalité du système scolaire et universitaire de la Troisième République tout en lui imprimant une orientation classiquement conservatrice." En raison, c'est vrai, des circonstances particulières et d'une période singulièrement troublée. L'Etat français se heurta, là comme ailleurs, "aux contraintes de la défaite et de l'Occupation". Mais aussi au manque d'unité de pensée et d'action de son personnel politique et de ses partisans ainsi qu'aux pesanteurs sociologiques et éthiques de la société française. Nihil novi sub sole...
<p align="right">Alain Sanders <a href= http://www.present.fr/ target=_blank>www.present.fr</a>