Philippique contre des Mémoires gaulliens par Jacques le Groignec (Nouvelles Editions Latines) Peu à peu, malgré le silence de la presse aux ordres et de la classe politique sur son déclin, la vérité historique déboulonne la statue de Charles De Gaulle, en attendant de lui faire mordre la poussière... dans l'esprit des Français. Devant ce travail lent mais inexorable, les premiers ébranlements produisent leurs effets. C'est pourquoi, comme il l'avoue lui-même plusieurs fois, le fils vient au secours du père. Kiosques et librairies ont été inondés, ces temps-ci, d'un volumineux entretien de plus de mille pages, sur deux tomes, de Philippe De Gaulle avec Michel Tauriac, paraphrasant, en les aggravant, les falsifications dont sont parsemés les "Mémoires" du défunt grand homme. Le général Jacques le Groignec remarque que "les questions posées ont été ciblées, afin de lui permettre de défendre son père, coûte que coûte, notamment en s'efforçant de disqualifier les auteurs de critiques non conformes à la vérité gaullienne" (page 149). En effet, Philippe en rajoute avec hargne sur ce que prétendait Charles, si bien que le mythe gaulliste en prend encore un sacré coup de la part de celui-là même qui s'efforce de l'entretenir. Je ne commenterai pas, puisque Jacques le Groignec l'a fait pour nous avec compétence sur un peu plus de 160 pages, le pavé intitulé "De Gaulle, mon père", bien que ma patience en soit venue à bout. Je ne le ferai qu'incidemment pour dire que les anecdotes familiales, la piété filiale, la teinte patriotique et religieuse qui enrobent cette oeuvre, ne sauraient nous cacher l'essentiel. Et encore la plupart de ces anecdotes sont-elles invérifiables et d'autres sujettes à caution. En tout cas, en voici une qui montre que le plaidoyer est exagéré : Philippe De Gaulle (page 291) raconte que Madame De Gaulle a quitté l'Angleterre, le 24 juillet 1943, pour rejoindre son mari à Alger. On compatit, évidemment, car le voyage sur un Lancaster quadrimoteur est inconfortable pour Anne, petite handicapée. Cependant l'épreuve aura été de courte durée, et toutes deux, avec la gouvernante attachée à l'enfant, retrouvent le Général, "villa des Oliviers, dans le faubourg résidentiel d'El-Biar".