On ne s'étonnera pas qu'à Lecture et Tradition, l'oeuvre des dominicaines de Fanjeaux et notamment de celles de Romagne aient conquis le bénéfice de l'inconditionnalité. Notre Poitou en effet revendique, entre autres privilèges, celui d'accueillir depuis six ans le cours Saint Thomas- d'Aquin à Romagne près de Couhé-Vérac, à une dizaine de lieues de Poitiers. Belle propriété, mais sans ostentation et pour l'aménagement de laquelle les mères ont consenti et consentent toujours de lourds sacrifices. C'est là que, fortes d'une tradition multiséculaire et dans la joie et la paix dominicaines, des religieuses préparent la jeunesse aux soifs d'une chrétienté exigente. C'est là-bas que plus de cent jeunes filles se préparent à assumer un jour ces grandes missions que le monde moderne veut récuser, à nourrir les vocations qu'il s'acharne à éteindre, mais que réclame avec l'urgence d'un péril grandissant, le salut du monde chrétien, c'est-à-dire le service de la Famille et celui de l'Eglise. Romagne est donc une oeuvre d'éducation par laquelle on s'attache, selon la formule du père de Chivré, à procurer aux enfants "les moyens d'acquérir le plein exercice de leur vie spirituelle de baptisés, celui de leur vie naturelle d'hommes (et de femmes) à valoriser et celui de leur avenir à favoriser; le tout illuminé par les données de la foi, de l'éducation et de l'instruction". Je ne cèderai pas à la tentation trop facile de jauger le cours SaintThomas-d'Aquin à la mesure trop courante et en réalité peu significative des succès remportés au baccalauréat qui, en tout état de cause, sont très largement satisfaisants. C'est plutôt par un autre aspect de l'oeuvre accomplie par les mères de Romagne que je voudrais mettre en valeur le caractère irremplaçable des véritables écoles catholiques. A Romagne, la vie scolaire s'écoule selon les principes et les exigences de la tradition catholique, c'est-à-dire que la formation de l'âme est inséparable de celle de l'esprit. Aussi bien, la tête doit-elle être non seulement bien pleine, bien faite, mais aussi "bellement" faite. Aux sordides déjections de la culture faisandée qui alimente les programmes officiels, on préfère avec sagesse des valeurs plus sûres comme Ronsard, Corneille, Racine, Bossuet, Molière, Balzac, Vigny, Chateaubriand, mais aussi Bernanos, Claudel, Brasillach et les Charlier. A Romagne donc, les enfants étudient, travaillent, prient et... chantent.