Editorial (extrait) par J.-B. Geffroy : Le matin du 10 mai 1940, l'Allemagne mettait fin à l'attentisme de la drôle de guerre, et ses armées déferlaient en Hollande, en Belgique, et le 13, en France à Sedan, symbole d'un désastre qui, soixante dix ans plus tôt, et sur les ruines de l'Empire, avait donné naissance à la IIIerne République. En deux mois de combats une nouvelle défaite était consommée, la plus tragique, la plus totale que la France ait connue. Il y a de cela cinquante ans. Les causes de ce cataclysme, les Français ont voulu les connaître. La vérité entrevue au procès de Riom a par la suite été largement étouffée, notamment depuis la Libération. Montesquieu a pourtant constaté que "si le hasard d'une bataille a ruiné un Etat, il y avait une cause générale qui faisait que cet Etat devait périr dans une seule bataille." Cette cause générale, obscurcie par les passions politiques de l'après-guerre et recouverte de la chape de plomb de la propagande résistantialiste, ne réside pas seulement dans les défaillances militaires, d'ailleurs réelles, de l'époque.Cette cause générale est essentiellement, fondamentalement politique. La défaite de 1940 est celle d'un système, celui de la IIIerne République, d'un régime à la dérive, paralysé dans son fonctionnement et surtout miné, au sens propre du terme, par ses contradictions. La première est celle qui a opposé sa politique étrangère et sa politique intérieure.. Après être revenu des illusions du pacifisme, du désarmement et de la sécurité collective, le régime est parti en guerre contre les dictatures et le totalitarisme, lançant la croisade des démocraties en s'en remettant à un réseau d'alliances, dont les obligations étaient d'autant plus difficiles à honorer que sa politique intérieure était à l'opposé de sa diplomatie, c'est-à-dire essentiellement défensive, pacifiste, voire antimilitariste. La démocratie parlementaire se méfie de l'armée dans laquelle elle ne voit qu'un repaire de factieux et l'instrument d'une éventuelle dictature. C'est Georges Mandel qui avouait cyniquement que : "Les démocraties ne préparent jamais les guerres que lorsqu'elles les ont déclarées. Il faut donc commencer par déclarer la guerre".