ÉDITORIAL : Dans notre numéro 755 (du mois de mars), nous annoncions l'ouverture d'une rubrique «Si De Gaulle nous était conté...» afin d'apporter la contradiction à la veulerie des innombrables adulateurs et flagorneurs qui se sont épanchés sans vergogne sur les mérites de ce personnage transfiguré en icône et révéré telle une idole ! Nous parvenons au terme du calendrier que nous avions fixé et ne pouvions mieux espérer que proposer, en guise de conclusion générale, le dernier des trois tableaux brossés par Jean-Baptiste Geffroy, sous le titre « Une tragédie française». Elle mérite amplement que la page de notre éditorial lui soit intégralement consacrée, afin d'abonder dans le sens de notre collaborateur pour affirmer sans crainte que les années gaulliennes furent une honte pour la France. Il nous suffit de lire les pages de notre ami pour connaître définitivement la laideur du personnage abusivement hissé sur un fallacieux piédestal. Des années 1940 à 1962, la France a connu et subi deux décennies d'une dictature intraitable. Pour seule preuve, nous extrayons rapidement quelques passages des propos tenus par Jean-Baptiste Geffroy : «De Gaulle fut un chef violent : condamnations à mort, exécutions, emprisonnements massifs, confiscations, recours à des polices parallèles, censure, répression des idées». Son alliance étroite avec les communistes fut une abjection, tout comme fut monstrueuse sa volonté inflexible d'effectuer une épuration proprement criminelle qui a touché de 1500000 à 2000000 de personnes, en 1944-1945 ! Quant à sa posture à l'égard des événements d'Algérie elle est tout simplement ignoble : «Une répression impitoyable, sordide, armée de sa justice d'exception et son bric-à-brac de lois pénales rétroactives, de procédures expéditives, de tribunaux forgés dans la négation des garanties les plus fondamentales». Le traitement appliqué aux harkis atteint les sommets de l'ignominie : «Leur abandon aura peut-être été la plus infâme des lâchetés de la France gaullienne, une de ces souillures dont on ne peut se purifier [...] Le pire est le silence de De Gaulle devant cette innommable boucherie. L'un des grands desseins du règne, promu par l'homme providentiel comme une impérieuse nécessité de l'histoire, s'abîme sur un charnier de 60000 à 100000 cadavres, torturés, émasculés, égorgés, ébouillantés». Inutile d'en rajouter : les faits sont là, décrits sous nos yeux, les chiffres sont donnés, les preuves sont exposées. Nous demandons à ceux de nos lecteurs qui pourraient encore être dubitatifs, de lire ces pages qui n'ont d'autre destination que de présenter les événements tels qu'ils se sont réellement déroulés, afin de comprendre que l'histoire n'est pas qu'une image d'Épinal bien coloriée, pour agrémenter les vacances des enfants... Nous vous assurons qu'après une telle lecture, nous ne pouvons concevoir ni comprendre qu'il puisse subsister encore tant de «gaullistes» pour se réclamer d'un être aussi abject ! Jérôme SEGUIN