ÉDITORIAL : « Que d'intelligences politiques guillotinées par le rasoir janséniste et pascalien (...) C'est à de tels hommes que l'on doit principalement l'effondrement de la Cité catholique... ». Cette phrase est la dernière prononcée par Louis-Edgard de Pinieux en conclusion de l'entretien qu'il nous a accordé pour exposer le contenu du livre qu'il vient d'écrire : Pascal. L'autre crise de la conscience européenne. Du fait de la réputation octroyée à Blaise Pascal dans les milieux catholiques, ce jugement iconoclaste ne va pas être du goût de la majorité ; et cependant, il n'y a rien à y redire : les éléments, les preuves, les recoupements sont réunis dans cet ouvrage pour confirmer le poids de cette lourde responsabilité. « Séduisant, éminemment talentueux, il était un des meilleurs écrivains de son époque et un grand scientifique », dit L.-E. de Pinieux. En effet, à l'âge de 16 ans, Pascal avait inventé la machine arithmétique, puis entreprit de mesurer la pression atmosphérique. C'est à la suite de sa conversion au jansénisme qu'il rejoignit Port-Royal des Champs, en 1654 (il avait 31 ans) où il rédigea les traités qui lui ont valu sa notoriété, Les Provinciales (1656), puis les Pensées (1658), avant de mourir quelques années plus tard, en 1662, à l'âge de 39 ans, seulement. C'est probablement son intelligence supérieure qui l'a rendu si séduisant. Mais elle fut parallèlement une arme à double tranchant, puisqu'il est impossible de ne pas accorder du crédit à ce qu'en dit L.-E. de Pinieux : « Il était l'archétype des jansénistes revendiqué par eux-mêmes tout au long du XVIIIe siècle et peut être assurément considéré comme un des principaux chaînons reliant la tradition à la modernité, devenant ainsi le responsable de l'effondrement de la pensée traditionnelle [...] Les intelligences catholiques ont été entraînées par Pascal à ignorer tout ce sur quoi était établie la société très chrétienne, à mépriser ce à quoi ils devaient de vivre catholiques [...] Le jansénisme est un anti-Concile de Trente, d'autant plus efficace qu'il passe pour le contraire de ce qu'il est ! Il a ouvert la route aux révolutionnaires, la route des intelligences et des idées... ». Ces quelques courts extraits sont une invitation pressante à la lecture de ce livre que l'on peut considérer comme une pierre supplémentaire et indispensable apportée à l'entreprise de reconstruction de l'édifice authentiquement catholique, très sérieusement ébranlé depuis tant d'années. Jérôme SEGUIN