Ceci n'est pas un roman, mais un récit, une chose vraie. "Monsieur Schubert", c'est le dernier jour de la vie d'un petit comptable. Ce jour est le 9 novembre 1989, date de la chute du mur deBerlin. Monsieur Schubert "vit, travaille, une étrange machine au-dessus de la tête qui tape, sans bruit, et retape, le tasse, implacable. Aussi chaque soir rentre-t-il un peu plus tapé, tassé, rapetissé que la veille". A sa façon il assume et exprime ce qui ronge notre monde et creuse une litière à la mort : l'ennui.
Monsieur Schubert à sa manière est un juste, mais un juste sans éclat, un pauvre, un petit juste ordinaire, mais perverti, broyé par ce regard d'une cruauté somme toute énigmatique mais profonde que jettent sur lui tous les collègues, tous les beaux-frères du monde, tous les pions mécaniques de l'abjection commerciale.
C'est l'histoire d'un de ces petits hommes gris que la vie sociale a dénaturés jusqu'à les métamorphoser en ces blattes que les murs des villes laissent courir le soir le long de leur grisaille jusqu'à leur anéantissement, symbole de la déroute d'une époque où les plus intelligents, les plus cultivés, les plus puissants, les plus riches sont éduqués à n'utiliser leurs atouts que pour appauvrir et humilier ceux qui ne les possèdent pas. Jusqu'à les tuer.