Une biographie enthousiasmante !
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.----. Celui qui allait devenir Monseigneur Thuan, salué par Jean- Paul II, lors de ses funérailles, comme « un messager héroïque de l’Evangile du Christ » est d’abord, quand il naît en 1928, un enfant du Vietnam, descendant d’une famille de martyrs catholiques, patriote et francophile.
Ordonné prêtre en 1953, étudiant à Rome, jeune directeur de séminaire inspiré par Don Bosco, évêque frappant par sa simplicité à No Thrang à partir de 1967, nommé en 1973 archevêque co-adjutateur de Saigon, Thuan se donne sans compter à sa vie de pasteur, conscient de la nécessité d’organiser son diocèse, de forger des âmes solides face à l’imminence de la persécution communiste.
Le nouveau pouvoir communiste qui a envahi le sud Vietnam le jette en prison le 15 août 1975. Commence alors pour lui une vie de serviteur souffrant du Christ qui durera treize ans. Soumis aux pires privations, à neuf années d’isolement, balloté de camp en camp, rien ne le brisera, il ne sera jamais jugé.
Il écrit clandestinement « Sur le chemin de l’Espérance » testament spirituel dont il découvrira étonné la diffusion mondiale à sa libération.
La pression internationale obtient sa libération en 1998. Contraint à l’exil, il parcourt le monde en apôtre. Le Pape Jean-Paul II le nomme Président du Conseil pontifical Justice et Paix en 1998, puis Cardinal en 2001.
Il meurt d’un cancer à Rome en 2002.
Il sera déclaré vénérable en 2017.
Ce récit riche en rebondissements, plonge le lecteur dans l’histoire mal connue et tourmentée du Vietnam au XX ième siècle, dans le drame politique, humain et spirituel vécu par tout un peuple, balloté de la présence française aux conséquences de la seconde guerre mondiale, pris en étau entre l’invasion japonaise, la lutte pour l’indépendance et la partition.
Puis la guerre menée par les États-Unis et l’offensive et la victoire communistes.
Un récit de nature à susciter d’utiles réflexions sur l’exercice du pouvoir, l’organisation de la société, le rôle et la mission de l’Eglise dans le monde, la nature du totalitarisme communiste et ses méthodes, la puissance de la foi, la force de l’homme appuyé sur Dieu.
Outre son intérêt historique et spirituel, cette biographie poignante réserve, de francs moments de jubilation quand la foi vécue, l’humour, la bienveillance envers chacun adoucissant les cœurs créent des situations ubuesques du point de vue des autorités communistes.
Personnalité lumineuse, facétieux, polyglotte, immensément bienveillant, d’une intelligence hors norme, François-Xavier Thuan a choisi Dieu et n’aura mis aucune limite à son amour pour le Seigneur.
Coup de chapeau à l’auteur, claire, précise, limpide qui sait restituer l’intense succession des évènements aussi bien que la variété des mouvements intérieurs des protagonistes.
Une biographie enthousiasmante, un témoignage très précieux , à transmettre à tous à partir de 15 ans.
PS Deux regrets: pas de cartes et pas de chronologie
PS : 123loisirs : Qui sommes-nous ?
Douze lectrices passionnées : Clémence, Sylvane, Hélène, Élisabeth, Gaëlle, Alexia, Isabelle, Stéphanie, Clotilde, Sybille, Aude, Alix et Claire sous la houlette de Valérie. Infirmières, enseignantes, bibliothécaires, éducatrices, elles mettent leurs compétences au service des lecteurs. De jeunes critiques lisent les livres en avant-première et donnent leur avis
Prises de position courageuses face au communisme !
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---- Mgr Thuan est incontestablement un homme au destin extraordinaire. Le prologue de la biographie que lui consacre Anne Bernet suffit à donner le ton : Kha est un jeune séminariste en 1885 ; il ne sera jamais prêtre. Il doit rentrer chez lui, son village a été incendié, les siens sont morts martyrs, les survivants, sa mère et sa sœur, ont besoin de lui. Ce jeune homme est le grand-père de Mgr Thuan. De catholique persécuté et n’ayant plus rien, il devient le principal conseiller de l’empereur du Vietnam. Après lui ses fils continuent son œuvre politique, gardant dans cette époque troublée un patriotisme jaloux de son indépendance, respectueux de la France de saint Louis et beaucoup moins de la république colonialiste. C’est l’un d’eux, Diem qui, quittant le cloître, devient président du Vietnam Sud en 1954 après la défaite des Français à Dien Bien Phu et la séparation du pays. C’est sa mort (il est assassiné en 1963) qui signe la fin de la protection du Sud de l’invasion communiste.
Thuan est donc à la fois l’héritier d’une famille catholique fervente qui s’honore des ancêtres martyrs mais aussi d’une famille très engagée dans la politique du pays, très patriote et très attachée à la culture et aux traditions vietnamiennes. Lui-même ne cherchera jamais à faire de la politique. En revanche, dès son jeune âge, il est remarqué pour sa piété et son goût de l’étude jointe à une intelligence et une mémoire prodigieuses. C’est ainsi qu’il saura par cœur toutes les épîtres de saint Paul, ce qui lui sera fort utile en prison. Au petit séminaire il se classe premier en latin et en chinois alors qu’il est absolument nul dans les activités sportives, sachant discerner déjà les priorités.
Le récit de ses années de formation, très intéressant au point de vue politique car c’est la guerre (Thuan perd un de ses oncles enterré vivant par les communistes), est aussi passionnant du point de vue religieux. Il reçoit une formation excellente : morale, par la rigueur qui règne au petit séminaire et l’exemple que donnent les missionnaires français des Missions Étrangères de Paris, intellectuelle et spirituelle car il est nourri des meilleurs auteurs : saint Thomas, bien sûr, mais aussi dom Marmion, Garrigou-Lagrange et même Bernanos dont il lit le Journal d’un curé de campagne.
Avec ces qualités, cette formation et cette famille, le jeune abbé est évidement promis à une belle carrière ecclésiastique ; il est le seul à ne pas y croire. Le destin semble apparemment de son avis lorsque, peu de temps après l’ordination, il est à l’hôpital, se mourant de la tuberculose. Mais pendant que l’armée française est défaite au nord, lui, au sud, est guéri miraculeusement et, du jour au lendemain, sort de l’hôpital. La suite renoue alors la logique précédente : études à Rome, directeur de séminaire et enfin évêque. Durant cette période c’est surtout la vie politique qui retient notre intérêt. Le président Diem essaie désespérément de conserver quelque chose de son pays, écartelé entre les Américains qui cherchent leur intérêt, les communistes du nord qui s’infiltrent petit à petit et les bouddhistes qui ne comprennent rien au patriotisme trop subtil du catholique. Finalement, un coup d’État plus ou moins monté par les Américains amène la chute du régime et l’assassinat du président.
L’attention se détourne alors de la politique pour suivre Mgr Thuan qui devient évêque de Nha Trang. Anne Bernet cite très abondamment les lettres pastorales du jeune évêque qui manifestent sa grandeur d’âme et sa détermination face au communisme mais aussi, hélas, son adhésion au concile qui a pourtant refusé de condamner le communisme. De manière significative, il prend comme devise épiscopale « Gaudium et Spes ».
Le récit redevient plus passionnant lorsque Thuan est arrêté après l’invasion du Sud Vietnam par les communistes. Commence alors ce qui est vraiment le cœur du livre, les treize années de détention et la résistance héroïque au lavage de cerveau communiste. C’est vraiment dans ces années que Thuan manifeste la qualité de sa vie intérieure qui le rend capable de supporter toutes les épreuves. La captivité de Mgr Thuan, en effet, n’est pas linéaire mais, au contraire, étant un prisonnier de marque, il reçoit un traitement de « faveur ». Il est envoyé un moment en camp de travail mais n’y reste pas longtemps. Il est emprisonné de diverses manières, parfois très sévèrement, parfois simplement en résidence surveillée avec un peu de liberté.
Finalement, il est libéré et doit se résigner à l’exil. La fin de sa vie se déroule principalement à Rome où il devient cardinal peu de temps avant sa mort en 2002.
Après avoir si bien commencé et s’être illustré ainsi dans le combat contre les ennemis de l’église, on ne peut qu’être un peu déçu de la fin de cet évêque devenu fidèle disciple de Jean-Paul II. Il a pourtant avoué qu’en prison il célébrait la messe traditionnelle à laquelle il était attaché. Il est aussi le neveu de Mgr Ngo Dinh Thuc, sédévacantiste célèbre qui a notamment sacré évêque le Père Guérard des Lauriers, professeur à Écône dans les débuts. Malgré cela, le livre mérite d’être lu tellement est belle et peu connue cette épopée des catholiques vietnamiens au XXe siècle [ Signé Abbé Louis Hanappier dans " Le Saint-Vincent " n° 29 le 23 mars 2021 ]