"Peut-on sauver Barrès, faire relire aujourd'hui ses Cahiers ? Le temps serait-il venu de tirer l'auteur du Culte du moi et des Déracinés, mort en 1923, de l'enfer où il séjourne depuis un bon demi-siècle ? Barrès est un antimoderne exemplaire, car nul ne fut plus ambivalent, plus joueur que lui à l'égard de la modernité, à la fois partie prenante de celle-ci, l'exténuant dans sa vie, mais lui résistant dans ses conséquences politiques et sociales , égotiste à la Stendhal ou à la Baudelaire, mais réactionnaire à la Balzac ou à la Barbey d'Aurevilly. "On sait quelle dimension nouvelle acquiert Barrès par la publication des Cahiers", signalait Albert Thibaudet dans La Nouvelle Revue française du 1er août 1934. Barrès entama la rédaction de ses cahiers le 11 janvier 1896, au lendemain des funérailles de Verlaine. Les Cahiers semblent relever du genre des souvenirs, mais l'entreprise se révèle vite plus diverse, plus complexe ..." Antoine Compagnon.
Les Cahiers sont un miroir le long de la vie et l'oeuvre de Maurice Barrès, qui oscillèrent entre égotisme et nationalisme. C'est aussi la matrice de ses romans. L'un des derniers grands documents jamais réédités dans son intégralité sur le monde littéraire et politique de la Ille République. On y croise notamment Jean Jaurès, Émile Zola, Alphonse Daudet, Paul Bourget, Anatole France et tous les figurants d'un théâtre lyrique sur lequel roulent le feu de la vie, l'obsession de la mort, la vulnérabilité des hommes. Ce premier volume couvre les années 1896 à 1904. Il est présenté par Antoine Compagnon, professeur au Collège de France et à Columbia University, auteur notamment chez Gallimard de Les Antimodernes, de Joseph de Maistre à Roland Barthes et Le Cas Barnard Fay, du Collège de France à l'indignité nationale. Les notes sont de Philippe Barrès, revues, augmentées et corrigées par François Broche.