Matulu est un journal culte - donc méconnu du grand public. Fondé par Michel Mourlet, chef de file d'une des tribus cardinales de la cinéphilie des années 60 (les mac-mahoniens), Matulu dure trois ans et imprime sa marque : un tirage de 15 000 exemplaires et une réputation flatteuse, illustrée notamment par ses dossiers : Rilke, Nimier, Caillois, Emily Dickinson, Perros, Follain, Barrès, Vialatte, Larbaud, Sachs, Bernanos, Valéry, etc. Les contributions des uns (Calet, R. Guérin, Dutourd, Etiemble, Ponge, Delteil, Lourcelles, Déon, Martinet) et les entretiens avec les autres (Cossery, Malet, Morand, Montherlant) constituent un singulier massif, iconoclaste, divers, lettré. Et son courrier des lecteurs passionne - où l'on croise Philippe Jaccottet, Jacques Chessex, Douglas Sirk, Patrick Grainville, Paul Bowles ou Frédéric Prokosch.
S'il est littéraire, le magazine se veut culturel au sens large : jazz, BD, théâtre, peinture, mode, gastronomie s'y côtoient. Matulu ne s'intéresse pas forcément à ce qui fait florès en ce temps-là (Sartre, Deleuze, Guattari, Derrida, la littérature-engagée, etc.) sans nécessairement l'exclure. Il s'agit de donner envie... et à voir ce qu'on tend alors à occulter : une certaine poésie, une certaine littérature. Vous lirez.
Dans le sillage des feus La Parisienne, Arts, Opéra où ferraillaient Nimier, Déon, Laurent, Blondin et consorts, Matulu encourage la curiosité - ses goûts sont alors si peu "à la mode"... qu'ils le sont parfois encore -, l'insolence mousquetaire, la polémique si elle n'est pas gratuite, le talent - qui discrimine positivement -, et la folie de la littérature, du cinéma, du théâtre : de la vie. "L'intelligence est une zone érogène", disait Raquel Welch. Voyez vous-même.