Auteur de Heptaméron.
5/5 Présent .
.----. Sœur aînée de François Ier, à qui un amour et une admiration indéfectibles la lieront jusqu'à la mort du roi; Marguerite reçoit une éducation soignée de leur mère, Louise de Savoie, dont la devise, Libris et liberis (pour les livres et mes enfants), peint le portrait d'une sorte de Mme de Chartres avant l'heure.
A une culture riche et variée, faite de grec, de latin et de musique, elle associe une formation historique destinée à une princesse appelée à prendre sa part dans le jeu politique de son temps. Elle n'oublie pas non plus de nourrir la piété de sa fille par une pratique religieuse dans laquelle la dévotion personnelle a la plus grande part.
Pas étonnant dès lors que, peut-être plus encore que son frère, Marguerite soit le premier soutien des humanistes et de tous les hommes de foi de son temps. Soucieuse de diffuser la parole de Dieu, notamment à travers les Evangiles, elle soutient ceux qu'on appelle aujourd'hui les " évangéliques ", groupés autour de Guillaume Briçonnet, l'évêque de Meaux, ou du clerc érudit Jacques Lefèvre d'Etaples, qu'elle défend contre les attaques d'une Sorbonne en grande partie corrompue.
On oublie aussi que celle qui protégea les lettres, dans la personne de Clément Marot - cet alter ego de Rabelais, un autre évangélique -, notamment, fut elle aussi un auteur de premier ordre. Son Heptaméron, recueil de nouvelles imité de celui de Boccace, vaut la peine d'être redécouvert.
"Marguerite" et " Perle de la Renaissance ", la duchesse d'Alençon puis reine de Navarre est décidément un personnage bien aimable de notre histoire.
[ Signé Maxime Valérien dans " Présent ", numéro 120027 du vendredi 31 décembre 2021 ]
Soeur, femme et grand-mère de roi.
4/5 Présent .
.----. Qu'il est mal connu, ce premier seizième siècle français ! On croit le connaître, à cause de 1515, du roi géant François Ier, de Léonard de Vinci ou des châteaux de la Loire... Si pourtant nous fouillons notre mémoire, à la recherche d'un souvenir scolaire de cette période, nous trouverons difficilement autre chose.
C'est qu'il est difficile de s'y retrouver. L'école républicaine a bien tenté pendant des décennies de faire entrer (avec un certain succès, d'ailleurs) dans la tête des élèves que l'essor de l'humanisme avait correspondu à un rejet des ténèbres et de l'obscurantisme médiévaux, que Dieu entrait en agonie pour laisser place à un homme enfin affranchi des calembredaines de la superstition et du fanatisme.
Pourtant, si Luther provoque le schisme protestant, quel espoir et quelle ferveur auront précédé cette tragédie !
C'est à ces années que la biographie que Patricia Eichel-Lojkine, professeur à l'université du Mans, vient de consacrer à Marguerite de Navarre, redonne vie. Le livre n'est malheureusement pas toujours exempt de tournures à l'emporte-pièce, mais il lui sera beaucoup pardonné pour le plaisir qu'il donnera a ceux qui le liront. ( suite ... )
Une femme d’exception qui marqua la Renaissance.
4/5 https://lemeridional.com/
.----. Elle est née l’année où Christophe Colomb découvrit l’Amérique. Marguerite de Valois-Angoulême, celle qui passera à la postérité comme Marguerite de Navarre, occupa une place d’importance plus que notable dans l’histoire du royaume de France. Patricia Eichel-Lojkine lui consacre une excellente biographie (Perrin) qui recense les aspects d’une personnalité exceptionnelle : mécène, femme de lettres, esprit diplomate… Ce n’est pas en vain que les poètes de l’époque la surnommaient « la perle des Valois ».
Qui était Marguerite de Navarre ? A vrai dire, on la connaît surtout au travers de la vie de deux hommes dont elle était proche : François Ier, dont elle était la sœur, et Henri II de Navarre, dont elle était l’épouse. Sans compter son petit-fils Henri IV. Mais contrairement à d’autres princesses ou reines – notamment prénommées pareillement – notre Marguerite a conservé une réputation sans fioritures. Elle semble avoir échappé à ces anecdotes « croustillantes » que l’histoire aime tant transmettre (ou inventer…) et amplifier à loisir.
Une femme politique
Époque particulièrement compliquée que cette première moitié du XVIème siècle… Les tensions entre catholiques et protestants sont récurrentes, et le feu couve sous la braise. Marguerite de Navarre est fervente catholique, mais son sens politique et sa volonté de discussion théologique lui font emprunter une voie conciliante. Alors qu’elle use de son influence auprès de François Ier pour encourager la clémence envers « ceux de la Religion Prétendue Réformée », l’affaire des Placards (1534-1535) fait voler en éclats le fragile équilibre : un pasteur réussit à faire afficher au cœur même de la demeure royale une « campagne » de tracts injurieux contre la messe. Les répressions contre les protestants du royaume seront immédiates et durables.
Marguerite de Navarre côtoie des intellectuels, des éditeurs, des religieux… elle fréquente aussi les puissants de la Cour et entretient de bonnes relations avec la maîtresse du roi, la duchesse d’Etampes. Elle reste un élément clé dans l’entourage royal.
Protectrice des arts et des lettres, elle écrit elle-même
Elle s’éloigne de la Cour après la fameuse affaire des Placards et met ce temps à profit. Celle qui parle plusieurs langues européennes – et prendra des cours d’hébreu – s’entoure d’intellectuels et joue un rôle de mécène (notamment auprès de François Rabelais). Mais elle compose elle-même de la poésie religieuse et des nouvelles (son recueil « L’Heptameron » est publié en 1559, dix ans après sa mort).
Aborder la vie de Marguerite de Navarre, c’est aussi se promener à loisir entre les événements historiques et les détails du XVIème siècle : des guerres d’Italie aux stratégies matrimoniales, en passant par les personnalités de l’époque, le commerce du livre, la traduction des cantiques en français, l’aménagement des châteaux et des jardins, les scènes de ménage… sans oublier quelques bûchers.
La bien nommée Perle des Valois serait aujourd’hui qualifiée de « femme moderne ». Pour respecter les canons du temps, on dira qu’elle était une humaniste accomplie, et surtout, une figure incontournable de l’histoire politique et culturelle de la Renaissance.
[ Signé : Jeanne RIVIERE le 6 février 2022 dans Le Méridional ]