Le livre de Marco Polo est le fruit de deux aventures. Celle de l'intrépide Vénitien qui pénétra jusqu'au plus profond de l'Asie, passa vingt ans au service de l'empereur mongol, le maître absolu de ces pays étrangers et fascinants, et effectua au retour un long périple, plus aventureux encore, par les Indes, ces royaumes peuplés de monstres, terres de rêves et de merveilles.
Il est aussi le résultat d'une aventure littéraire qui n'est pas moins déconcertante que la vie de Marco Polo. En fait, Le Livre des Merveilles n'est pas vraiment le récit de ses voyages. On oublie trop souvent qu'il fut écrit par un Italien de Pise, homme de plume, familier des rois d'Angleterre et des Angevins de Naples, en français, langue de ces cours princières et de leurs cénacles d'auteurs. Comme le titre original l'indique, c'est un Devisement, c'est-à-dire une œuvre qui s'inscrit dans la tradition des trouvières et des encyclopédistes, qui cherche à instruire autant qu'à plaire. uvre composite et de collaboration, née d'une rencontre de hasard, il reflète cette civilisation de cour trop méconnue des années 1220, ses curiosités, sa soif d'apprendre, son inébranlable fidélité aux textes et, surtout, l'éclat de ce premier humanisme français, capable de s'imposer alors dans tout l'Occident.
Professeur d'histoire médiévale à Paris IV, Jacques Heers est l'auteur de plusieurs livres sur l'économie et la société au Moyen Age (dont Esclaves et domestiques au Moyen Age dans le monde méditerranéen, et Fête des fous et carnavals, Fayard). Il est aussi l'auteur de biographies, Christophe Colomb et Machiavel.