La notion de "droits de l'homme", pour le sens commun, ne saurait impliquer par elle-même qu'une vision flatteuse de la nature humaine. Or il se trouve que le contexte intellectuel où elle éclôt, tributaire de l'esprit des Lumières, semble tout au contraire, et à divers égards, très réducteur de l'être humain. Le présent ouvrage veut prendre en compte un des aspects de cette logique de réduction: celui qui tient à l'individualisme ambiant, c'est à savoir au postulat de l'être humain comme isolé dans la nature par vocation originelle, donc non pourvu essentiellement de dimension ni aptitudes relationnelles. Car ce type d'hypothèse de départ ne peut guère qu'esquisser le profil d'un archétype humain équipé pauvrement quant à l'intellectuel et quant à l'affectif. Incidemment, une telle logique, maniée par des penseurs de sexe masculin, a un effet dévastateur sur l'image de la femme, réduite à l'organique à l'infra-humain, à l'instrumental. Et cet effet lui-même, par un choc en retour, aggrave encore, naturellement, la perspective rétrécissante de l'être humain en général. Il y a un paradoxe intéressant du côté de l' "humanisme" des lumières et de la Révolution. C'est cet humanisme très insolite que l'historien a essayé de circonscrire et d'élucider, à partir d'un dépouillement massif et très diversifié, autant que faire se peut, des sources du temps.
Xavier Martin, Professeur des Universités, enseigne l'histoire du droit, l'histoire des idées politiques, la philosophie du droit. Plusieurs de ses nombreuses études sur certains des fondements doctrinaux méconnus de la Révolution française et du Code civil de 1804 ont été traduites en italien, en japonais, en espagnol et en anglais.