Après la conquête de cette terre d'Afrique qui n'avait pas encore de nom en 1830, on a présenté le peuplement aux Français comme une chance unique de quitter la misère, qui sévissait dans l'Hexagone, et aussi comme une fabuleuse aventure humaine. Cent trente-deux ans plus tard, ils revenaient d'où ils étaient partis, par bateaux entiers, déracinés, accablés de reproches. En métropole on jugeait leur accent vulgaire, on disait qu'ils avaient mal traité les Algériens, les exploitant paraît-il sans vergogne, amassant des fortunes... Rétorquer qu'ils avaient contribué à faire passer la société arabo-berbère du Moyen Âge à la modernité ne leur servait à rien : on les rendait responsables d'une guerre, qu'ils avaient de surcroît perdue.
La vérité, bien sûr, n'est pas aussi abrupte. Raphaël Delpard, qui a combattu en Algérie, rendu à la vie civile, a tenté de comprendre, de réunir les faits, non pas au niveau de l'examen politique, mais à celui de l'homme de la rue. Il expose, sans langue de bois ni favoritisme pour aucune des communautés, les errances, les craintes, les erreurs, les malentendus ; il met en lumière l'abandon de Paris, que l'Algérie n'a vraiment jamais intéressée ; les manipulations et les mensonges d'une classe politique qui, après la fin de l'Indochine, trouva avec le conflit franco-algérien, le discours satisfaisant son ego, devenant de facto le porte-parole d'une prétendue misère, qu'elle n'a pourtant pas rencontrée.
L'Histoire vraie des Français d'Algérie : une page d'histoire, d'amour et de larmes, entre deux grands peuples qui ne se sont pas encore remis de leur rendez-vous manqué.