En mai 1866, John Fielding, un jeune Anglais traverse la mer d'Irlande pour occuper le poste de régisseur du terrible lord Ashton, dont la rapacité en affaires n'a d'égale que son habileté. Despote sur son domaine, il tient à sa merci ses paysans qui, excédés, ne rêvent que d'interrompre le paiement des loyers de ses terres et de brûler le magnifique château de Castleragh, situé près de Galway, symbole des peines ininterrompues qu'ils ont eu à subir depuis la "Grande Famine", survenue vingt ans plus tôt.
Entre la violence des uns et la rouerie des autres, le régisseur a fort à faire dans son emploi, d'autant qu'il éprouve un vif sentiment pour la belle Kathleen Fitzgerald, fille du principal débiteur du lord. Un pied dans la misère, l'autre dans les salons brillants de l'aristocratie, il éprouve le poids des contradictions de la société irlandaise du XIXe siècle : les fastes d'une minorité jetée à la face d'une population largement démunie, l'opposition de deux religions différentes et les bruits d'une révolte qui, partie des États-Unis, menace d'ensanglanter le pays tout entier.
Un héritage imprévu le met en position, par des investissements judicieux, d'améliorer le sort des agriculteurs, mais il comprend rapidement que la tâche qu'il s'est imposée rencontre bien des oppositions, en premier lieu des paysans eux-mêmes. Devra-t-il renoncer, s'éloigner de l'Irlande dont il s'est fait une seconde patrie et oublier Kathleen ?
Né près de Besançon, vieille ville espagnole, ce siècle ayant cinquante et un ans, Philippe Thomas éprouve très jeune un goût littéraire contrarié, comme bien d'autres, par les obligations de la vie et les nécessités alimentaires, dévoreuses de vocations. Le prosaïque l'emportant donc provisoirement, il écarte les Lettres au profit du Droit, hante plusieurs administrations et fréquente les cercles du pouvoir local.
L'histoire ayant pourtant sa morale, comme la fable, il finit par retourner à l'écriture et s'y consacrer définitivement : les Lettres ont toujours gain de cause.