Demande-t-on à une mouette de pondre des oeufs de caille ? À un chat de se changer en tigre ? Ce sont pourtant des images qui viennent à l'esprit du lecteur contemporain en lisant Les Grotesques, par Théophile Gautier. Il faut reconnaître que ce sentiment naît, en partie, de la composition du livre ; Théophile Gautier, après avoir écrit pour La France littéraire et la Revue des Deux Mondes diverses Exhumations littéraires portant sur des auteurs vilipendés ou ignorés par Boileau, finit par les réunir, produisant en librairie un curieux échantillon d'histoire littéraire : Les Grotesques (Desessart, 1844), un livre intéressant toujours, discutable souvent.Ces auteurs « grotesques », poètes ou poètes et prosateurs, ayant vécu au dix-septième siècle - Villon excepté ! - était traînés dans la boue, tel le père Pierre de Saint Louis, d'autres, au contraire, se voyaient réhabilités, ou même encensés. Théophile Gautier avait ouvert des portes, car sans Les Grotesques, serait-on revenu à Scalion de Virbluneau, fût-ce pour estimer à leur juste valeur et Saclion de Virbluneau et son commentateur ? Le certain est que Théophile Gautier avait regardé tous ses exhumés d'un oeil romantique, au point que certains d'entre eux, Saint-Amant, par exemple, ou Théophile de Viau, devenaient les précurseurs des romantiques de 1830. Il est permis de rester sceptique, mais après coup, car notre auteur est animé d'un tel désir de séduire et son écriture si efficace, que le lecteur se trouve pris au piège.