Enfin un peu d'optimisme dans ce monde d'enfermés !
5/5 Monde et Vie
.----. Enfin un peu d'optimisme dans ce monde d'enfermés ! Anthony Cortes, 30 ans, journaliste à Marianne, nous raconte le réveil de la France rurale, qui n'en finissait pas de se remettre d'avoir été la grande oubliée des 30 glorieuses et qui, aujourd'hui, sort de la déploration pour entrer dans l'action. Par l'Abbé G. de Tanoüarn
Pour la première fois depuis longtemps, il y a aujourd'hui plus de gens de la ville qui rejoignent la campagne que de gens de la campagne qui, dans une énième version du terrible exode rural, rejoigne la ville. Le Covid n'est d'ailleurs pas pour rien clans ce mouvement de balancier qui s'amorce enfin: c'est à la ville qu'on attrape le Covid , c'est au sein des grandes conurbations internationales qu'il se propage.
Comment s'en protéger ? En revenant à la campagne. Les agents immobiliers sont les premiers à avoir senti ce frémissement du marché qui est le leur. Évidemment ce réflexe est particulièrement valable pour des installations en péri urbain : à choisir entre une banlieue sinistre mais bien desservie et une zone péri urbaine à la campagne ou dans une petite ville, beaucoup de jeunes familles préfèrent éviter le rêve diversitaire des banlieues et partir un peu plus loin. D'autres, attirés par une vie simple et paisible, plongent encore plus loin dans les territoires, quitte à rejoindre un village perdu, où l'immobilier est particulièrement bon marché et où la 5G est arrivée (ça existe). Il est clair que le télétravail (en particulier grâce à Internet) rend particulièrement attractifs ces petits coins de paradis qui valent juste un peu plus qu'une bouchée de pain. Mais le réveil des campagnes resterait un faux semblant s'il fallait se contenter d'enregistrer un flux de population.
Ce qui est passionnant, c'est la manière dont les nouveaux arrivés rejoignent les jeunes qui sont nés au village, pour faire vivre leur campagne. C'est un mode de vie auquel ils adhèrent, des habitudes de sociabilité, des solidarités concrètes qui se tissent. Anthony Cortes n'oublie pas qu'il est journaliste. Il ne se contente pas de citer Christophe Guilluy, le sociologue, inventeur en 2005 de la notion de France périphérique, que l'on appelle aussi la France des territoires, ou encore Emmanuel
Todd, l'auteur du concept bien pessimiste de « masse centrale atomisée ». Il les a lus, mais il ne cherche pas à appliquer brusquement ses lectures dans n'importe quel contexte. Il part à la découverte des villages un peu partout en France, il rencontre les gens, Annie, Didier, Marine ou Mickaël, et il les fait parler de leurs espoirs et de leurs projets, de leur vie, de l'emploi qu'ils ont trouvé.
Cela donne une image beaucoup moins tristement uniforme de la vie à la campagne.
Ce sont par exemple pour certains parmi les interrogés, de ces anciens Gilets jaunes qui ont contribué à sonner l'heure de la fin du désespoir. Ils expliquent comment aujourd'hui, malgré les LBD et l'impossibilité de continuer leur lutte, leur vie a changé, comment une prise de conscience s'est opérée en eux. Malgré une Extrême gauche qui aura tour fait pour récupérer le mouvement et briser son élan remarquable, beaucoup ont compris que la meilleure manière de continuer la révolution du local contre le global était de la faire entrer dans les moeurs. Les ronds-points sont devenus virtuels : on retrouve les GJ sur Internet, avec des taux de fréquentation qui demeurent élevés et une certitude acquise de la valeur de ce qu'ils entreprennent malgré le poids des normes administratives.
Toul n'est pas rose, loin là, mais les territoires se révèlent comme des lieux où l'on peut entreprendre, créer des ressources agricoles et des circuits courts pour les écouler au meilleur prix, ouvrir un magasin coopératif ou sillonner le territoire avec des camions transformés en salle ambulante de soins médicaux.
L'important, c'est que la campagne désormais semble d'ores et déjà pouvoir retenir sa jeunesse (29 % des jeunes de 29 ans) et qu'entre le Covid, les Gilet jaunes et l'horreur de certaines banlieues, elle présente aujourd'hui comme une vérita alternative positive, jeune, attractive, aux grandes métropoles et au mode de de vie stressé qu'on est obligé d'y embrasser.
« Alors qu'on la croyait morte, écrit Anthony Cortes, la France n'a jamais arrêté de poursuivre son chemin. En se réinventant, en innovant, par ses forces propres comme de celles de ses pièces rapportées, ces citadins qui peuvent être des joyaux ou des tombeaux selon leurs intentions ».
<p align="right">Monde et Vie n° 997 Avril 2021 <a href= http://www.monde-vie.com/ target=_blank>www.monde-vie.com</a>