"A part les points de doctrine définis, et ils sont peu nombreux, la théologie du Purgatoire est l'une des pages les plus humiliantes de la science sacrée : je veux dire l'une de celles où notre ignorance et notre insuffisance sont le plus impitoyablement constatées." Mgr Gay
Est-ce à dire que la lecture des révélations des saints au sujet du Purgatoire, est inutile, et même dangereuse, comme on l'a écrit ? Ces révélations que l'Église n'accepte pas comme sources de son enseignement théologique, n'en sont pas moins tenues par elle en très haute estime, à cause de la sainteté des personnages dont elles émanent et des grandes leçons quelles renferment.
Dans ces matières sur lesquelles l'enseignement des théologiens a peu de choses à nous dire, le regard des saints, cet oeil du coeur illuminé par l'amour, a entrevu bien des choses qu'il est bon de recueillir. D'ailleurs si les détails varient, avec le caractère et les habitudes d'esprit du voyant, les grandes lignes du tableau se retrouvent partout les mêmes : la sévérité des jugements de Dieu, la rigueur des expiations du Purgatoire, la nécessité de fuir le péché pour épargner ces supplices, le devoir pressant de nous souvenir de nos chers défunts et de procurer leur soulagement par tous les moyens qui sont en notre pouvoir. Voilà ce qui fait le fond de toutes ces révélations, et ce qu'il faut en retenir. Qu'importe ici la part plus ou moins grande qui reste à la personnalité de l'extatique ? En nous faisant assister aux spectacles qu'il a contemplés dans les rayonnements de l'extase, en nous répétant les cris de détresse qu'il a entendus monter des profondeurs de l'abîme, il touche nos coeurs, les arrache à leurs préoccupations égoïstes, à cette dissipation habituelle, à cette fascination de la niaiserie qui, selon la pensée de l'Écriture, énerve les plus belles intelligences. Il nous force à réfléchir sérieusement aux responsabilités de l'avenir, à la sainteté infinie de Dieu, à la gravité du péché, même véniel, toutes choses que l'on est trop porté à oublier dans l'habitude de la vie ; oubli fatal qui est la cause de la plupart de ces fautes. Si nous pensions plus souvent à nos fins dernières, à ce qui nous attend au lendemain de la mort, jamais nous ne pécherions, dit l'Esprit Saint. C'est précisément pour raviver le souvenir de ces fins dernières, que ce petit livre a été composé.