Le Petit Crapouillot de Jean Galtier-Boissière fut tout d'abord une modeste publication de transition entre le Crapouillot d'avant 1940 et celui qui reprit son cours en 1948, sans avoir rien perdu de son ton insolent et de son mordant, à tel point qu'il surprend aujourd'hui où le "Vénéré Directeur" aurait sans doute succombé sous les procès qui, dans notre société, ont efficacement remplacé la censure d'Etat. Au début simple bulletin de liaison avec ses anciens abonnés, clients et amis, imprimé avec les moyens du bord, Le Petit Crapouillot retrouva peu à peu la typographie soignée qui est l'un des traits marquants des publications de Galtier-Boissière, avec des illustrateurs comme Gus Bofa ou Pierre Falké, parmi bien d'autres. Notre choix de chroniques ne représente guère plus du dixième des textes publiés par Galtier dans ce "Guide du bibliophile", devenu au fil des ans un "supplément" mensuel au "grand" Crapouillot. Mais il suffit à montrer combien ses notes de lecture sont variées, volontiers hétéroclites, voire contradictoires dans leurs appréciations. Il existe cependant une constante qui guide la plume de notre auteur : l'absolue liberté de ton, de tout penser et tout dire, même et surtout l'inconvenant, le non conventionnel : aucun sujet n'est tabou, aucun écrivain n'est sacré. L'argot, les filles, la gastronomie, le vagabondage parisien, mais aussi le goût de la polémique et de l'anecdote historique, la bibliophilie, la reconnaissance des grands lyriques de la littérature et de la peinture, la passion de la liberté et l'adhésion sans réserve au pacifisme et à la pensée anarchiste, voilà quelques thèmes qui passent de l'une à l'autre de ces 127 Chroniques. L'ensemble est complété par deux Annexes : une étude biographique de Galtier-Boissière publiée à sa mort par François Aman-Jean et le catalogue de la "dispersion de la célèbre bibliothèque d'argot" de l'auteur.