En 1964, pour contester la Ve République qui venait de naître, François Mitterrand écrivait "Le coup d'État permanent". Quarante-trois ans plus tard, en 2007, la candidate socialiste à l'élection présidentielle, Ségolène Royal, avouait publiquement vouloir le mettre en œuvre pour passer à la Vie République. Les moyens qu'elle prévoyait pour réaliser ces réformes institutionnelles pouvaient, en effet, être qualifiés de "coups d'État", si l'on entend par là, comme jadis François Mitterrand, une violation préméditée et massive des règles constitutionnelles par les détenteurs du pouvoir ou, si on le définit avec Paul Bastid, comme l'"acte d'une autorité constituée portant une atteinte illégale et brutale à l'ordre qui la constitue pour s'emparer du pouvoir ou s'y maintenir".
Où se trouve confirmé ce que l'histoire laissait entrevoir : même s'il a de nos jours très mauvaise presse, étant perçu comme une infraction impardonnable au dogme de l'Etat de droit, et même si certains esprits rassurants assurent qu'il appartient au passé, le coup d'Etat est de tous les temps. De tous les temps et de tous les lieux, dans la mesure où il paraît inhérent au jeu politique et aux rapports conflictuels que celui-ci noue parfois avec le droit qui l'encadre, l'organise et le (dé) limite.
Le coup d'Etat, scandale ou nécessité ? Légitime ou condamnable ? Recours à la force ou dernier mot du politique ? Telles sont les interrogations qui ont occupé, les 2 et 3 décembre 2004, des juristes, des historiens et des philosophes, réunis à l'Université de Caen autour de cette notion, certes fantasmatique et passablement sulfureuse, mais plus actuelle que jamais.