Déjudaïsation de l'antique Israël.
5/5 Les Annales .
.----. MM. Jérôme et Jean Tharaud nous donnent un nouveau roman juif, qui est, sans aucun doute, avec L'Ombre de la Croix, le meilleur des ouvrages qu'ils ont jusqu'ici consacrés à Israël. Exactement, ce pourrait être la suite de L'Ombre de la Croix, si le héros de ce roman n'était pas mort à la dernière page.
L'Ombre de la Croix évoquait l'enfance pieuse d'un petit juif dans un ghetto de Galicie ; La Rose de Sâron nous peint les années d'adolescence de cet enfant du ghetto ; d'abord dans deux ou trois yéchibas ou écoles supérieures talmudiques qu'il fréquente en qualité de bocher, c'est-à-dire d'étudiant rabbinique, puis dans une petite ville de Hongrie, où il est devenu précepteur des deux enfants d'un avocat juif demi-assimilé, enfin à Paris, où il vient s'initier à la science moderne.
Les frères Tharaud, après avoir évoqué la vie traditionnelle des juifs d'Europe orientale, abordent, aujourd'hui, le thème de la déjudaïsation de l'antique Israël. Leur héros s'évade du Talmud et succombe à la tentation du modernisme. Quand nous le quittons, dans un restaurant juif du quartier des Archives, il s'apprête à s'élancer à la conquête de Paris. Un prochain livre nous le montrera extérieurement francisé, sinon assimilé.
Il faut louer la finesse avec laquelle MM. Jérôme et Jean Tharaud ont évoqué le glissement discontinu de cette âme juive vers la culture moderne, avec ses incessants retours sur elle-même. Malgré quelques grossissements peut-être inutiles, on peut dire que les frères Tharaud ont admirablement réussi à saisir et à exprimer cette psychologie en zigzag particulièrement délicate. [ Signé Benjamin Crémieux dans le numéro 2295 du premier octobre 1927 ]}