La réforme intellectuelle et morale de la France Pour Ernest Renan, les désastres de la guerre et de la Commune furent, sans doute, une douloureuse surprise, mais, comme le prouve son livre La Réforme intellectuelle et morale, d'abord mis à l'index par les républicains, puis réhabilité par Maurice Barrés et l'École de l'Action française, ils ne tardèrent pas à faire de sa part l'objet de commentaires lucides et apaisés, ni surtout à se trouver incorporés à l'ensemble des idées que caressait l'historien-philosophe à propos de l'avenir de l'Europe et de la France. Loin de représenter un accident dans une carrière paisible, féconde et en somme dévolue au confort intellectuel, La Réforme intellectuelle et morale fruit de l'angoisse dominée, de l'amertume résignée et de la sérénité reconquise, ne se comprend bien qu'à l'écart des vaticinations et des anathèmes du clan Gambetta. Son utilisation par Maurice Barrès et Charles Maurras était de bonne guerre, mais c'est dans l'ensemble de l'oeuvre renanienne, et en lui donnant sa signification de complète réaction contre le romantisme et la démocratie qu'il faut la replacer. La Réforme intellectuelle et morale a d'abord été publiée sous forme d'articles de 1860 à 1871. Qu'est-ce qu'une nation ? Dans un texte intitulé L'Alsace est-elle allemande ou française ? l'historien Fustel de Coulanges avait contribué à fixer, dès le début de la guerre franco-allemande de 1870, l'opposition entre la conception française et la conception allemande de la nation : "Ce qui distingue les nations, avait-il écrit, ce n'est ni la race, ni la langue. Les hommes sentent dans leur coeur qu'ils sont un même peuple lorsqu'ils ont une communauté d'idées, d'intérêts, d'affections, de souvenirs et d'espérances. Voilà ce qui fait la patrie." Dix ans plus tard, le 11 mars 1882 à la Sorbonne, Ernest Renan fixe les termes de la conception française de la nation, une conception volontariste, politique, selon laquelle, suivant sa célèbre formule, "l'existence d'une nation est un plébiscite de tous les jours". Prière sur l'Acropole La célèbre Prière sur l'Acropole d'Ernest Renan constitue en fait le chapitre II de ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse publiés en 1883. Renan y évoque la découverte qu'il fit de la Grèce lors d'un voyage en 1865.