la Révolution au séminaire .
5/5 Monde & Vie
.----. Pour un peu, on pourrait croire à un titre de roman historique, avec un relent de mystère
romain, une histoire perdue quelque part dans la conquête de l’Italie par un certain
général Bonaparte. Santa Chiara, évidemment, ce pourrait être aussi le nom d’un vin
italien, à déguster en terrasse, pour se rafraîchir un soir d’été. Pourtant, c’est ce même
clin d’œil italien qui d’emblée ouvre une autre perspective au connaisseur de l’histoire
religieuse. En effet, ce nom, c’est d’abord, et surtout pour les Français, celui de la rue de
Rome où se situe le Pontificium seminarium Gallicum. Autrement dit, le Séminaire
français de Rome !
C’est là que devait atterrir en 1959 le jeune Charles Hervé, séminariste breton qui avait
suivi ses études en vue du sacerdoce à l’Institut catholique de Paris et au Séminaire
universitaire des Carmes. Comment s’est-il retrouvé à Paris, puis à Rome, plutôt qu’en
Bretagne ? Charles Hervé le raconte dans ce livre de souvenirs, qui dépasse de très loin
le simple récit personnel pour s’élever au rang d’un témoignage pour l’histoire. De
manière plaisante, sans jamais se prendre au sérieux, il y explique la fin de deux mondes :
celui de la présence française en Afrique du Nord et celui de l’Église du pape Pie XII.
Comme il le dira des années plus tard à Mgr Lefebvre, avec une certaine hésitation, c’est
au Séminaire français de Rome qu’il découvre combien le modernisme et la subversion
ont pénétré l’Église. Non seulement au sein du séminaire lui-même, où se murmure La
Marseillaise à la lecture d’un texte du cardinal Ottaviani, préfet du Saint-Office, qu’à
l’université Grégorienne, tenue par les Jésuites et où plusieurs enseignants distillent le
poison dans les intelligences. Les souvenirs de Charles Hervé fourmillent de faits, petits
ou grands, qui restituent le climat d’une époque qui a profondément changé le visage de
l’Église et meurtri quantité d’âmes. On s’en doute, jamais Charles Hervé, qui claquera la
porte du Séminaire français de Rome, n’accèdera au sacerdoce.
Cette subversion, il l’avait vue à l’œuvre lors de son séjour en Allemagne et en Algérie
pendant son service militaire. Rempli d’idéal, le jeune homme n’envisageait pas sa
présence obligée par la République autrement que comme un envoi en mission, un
témoignage en faveur de l’âme catholique de la France. Il découvrira combien ses
propres confrères étaient déjà passés à l’ennemi. Charles Hervé a toujours nourri une
vive admiration pour Jean de La Varende et au terme de son récit, on comprend mieux
la formule utilisée par l’abbé Lorans dans sa préface: les manants de la foi. [ Signé : Philippe Maxence dans " Monde & Vie ", n° 815, 29 août 2009 ]
Décourager les vocations ?
5/5 Rivarol .
.----. « Des mémoires pour servir à l'histoire de l'Eglise » (dixit l'abbé Alain Lorans dans la préface), «
sorte de confession d'un enfant du demi-siècle » ajoute Alain Sanders en postface, les souvenirs
de Charles Hervé prouvent que la subversion couvait bien avant l'ouverture du funeste
concile au séminaire français de Rome et que l'abandon de l'Algérie était programmé
fort en deçà du processus « d'autodétermination ».
En 1959/60, le père Barré, supérieur de Santa Chiara – où Témoignage chrétien a droit de
cité alors qu'Itinéraires et... Écrits de Paris sont proscrits –, souffre sans mot dire que
l'allocution du cardinal Ottaviani, lue au réfectoire en hommage aux prélats persécutés
d'Europe de l'Est, soit ponctuée du fredon révolutionnaire, la réaction indignée du jeune
séminariste étant qualifiée « d'impulsive et rebelle ». Tout était déjà en place pour
décourager les vocations les mieux mûries, comme celle de Charles Hervé dont la
navrante expérience précède largement Vatican II.
Un chemin spirituel qui commence avec le catéchisme à Puteaux, M. Hervé père
enseignant l'anglais au lycée de Suresnes. Les recteurs bretons environnant la résidence
estivale de la famille paternelle, le service de la messe, le scoutisme, entourent l'enfant
puis l'adolescent d'un climat propice à l'épanouissement de l'appel sacerdotal.
Philosophie scolastique à la Catho, séminaire universitaire des Carmes, intermède du
service militaire en Allemagne prolongé en AIgérie, enfin Rome d'où le chasse, au bout
de sept mois, la vindicte du père Barré qui poursuivra sans relâche ce résistant
impénitent devenu persona non grata au grand séminaire de Rennes comme aux Carmes.
Né trop tôt (1934) pour intégrer Ecône, Charles Hervé nous fait toucher du doigt le
travail souterrain des théologiens modernistes et la lâcheté des prêtres les mieux formés,
tel l'abbé Luc Lefebvre, suivant le mouvement impulsé par les fossoyeurs de la foi.
Réduit à l'état laïque contre son gré, marié et père de quatre enfants – dont l'un a
embrassé la vie religieuse qui lui fut refusée –, il poursuit le combat pour la restauration de la
Tradition au sein de l'Eglise.
[ Signé : Marie-Gabrielle Decossas dans " Rivarol ", n° 2904 du 7 mai 2009 ]
Document de première main !
5/5 Le Chardonnet.
.----. La Marseillaise de Santa Chiara
Souvenirs d’un séminariste d’avant Vatican II
Le Séminaire français de Rome ou « Santa Chiara », du nom de l’église du séminaire,
était le lieu de formation sacerdotale de l’élite du clergé français. Mgr Lefebvre et son
frère aîné y firent leurs études ecclésiastiques.
Charles Hervé se sentant appelé par Dieu commencera ses études à l’Institut catholique
de Paris, puis au Séminaire des Carmes avant les vingt-sept mois de service militaire, en
pleine guerre d’Algérie. Envoyé ensuite à Rome pour y suivre sa théologie, l’auteur y
découvre avec stupéfaction un séminaire gangrené par la propagande de gauche, tant
politique que religieuse.
Le Concile Vatican II vient à peine d’être convoqué mais déjà bien des esprits sont prêts
à emboîter le pas au vent de réformes et de révolution qu’il apportera.
Ces mémoires constituent un document de première main sur l’ambiance et les
mentalités qui dominent dans les paroisses tant en Bretagne qu’à Paris, dans les
séminaires parisiens et romains au tournant des années soixante. Charles Hervé évoque
sans amertume mais avec lucidité l’effritement d’un esprit religieux ouvert au
changement, méprisant la Tradition et déjà bien touché par l’esprit moderniste. Jusqu’à
cette Marseillaise entonnée pendant la lecture à table d’une conférence du Cardinal
Ottaviani.
Témoignage chrétien et Le Monde constituaient, il est vrai, la presse lue par
certains et qui ne s’en cachaient pas. Rien d’étonnant alors à ce que des séminaristes
approuvent les révoltes d’Algérie et souhaitent, en toute charité, la condamnation à mort
des opposants à l’indépendance du pays...
De nombreuses figures ecclésiastiques ou du monde des lettres s’inscrivent dans le
chemin spirituel d’un jeune catholique qui se retrouve dans le devoir de choisir, pour
accéder au sacerdoce, entre sa fidélité à la foi catholique et l’acceptation des orientations
nouvelles. C’est ainsi que Charles Hervé croisera ou connaîtra plus intimement des
hommes aussi divers que Merleau-Ponty, La Varende, l’abbé Ange Roussel, auteur de
Libéralisme et Catholicisme, le Père Gazelles, le chanoine Verneaux, le Père Fuchs,
professeur de théologie morale, disciple de K. Rahner, le Père Emile Osty, l’abbé
Lustiger (futur cardinal), le tout fraîchement créé Cardinal Béa, sans oublier Mgr Marcel
Lefebvre, l’abbé Montgomery-Wright, curé du Chamblac, l’abbé Luc Lefèvre, fondateur
de la maison d’édition Le Cèdre et de la revue La Pensée catholique, et bien d’autres.
Après La blessure de Jean-Pierre Dickès qui nous donnait un témoignage légèrement
postérieur sur le séminaire d’Issy-les-Moulineaux, « La Marseillaise de Santa Chiara » de
Charles Hervé vient confirmer les prémices d’un bouleversement doctrinal que le
Concile Vatican II amplifiera et validera, dans les lieux mêmes où la foi catholique aurait
dû être préservée. les séminaires. [ Abbé Philippe Bourrat Le Chardonnet, mars 2009 ]