Si Napoléon avait été aux Invalides
5/5 Le Salon Beige .
.----. L’abbé Michel Viot imagine la scène :
Oui ! Je fais un rêve, ou plutôt un cauchemar. J’entends tout d’abord l’appel musulman à la prière et vois dans une brume épaisse, une forme d’église classique. Je pense immédiatement au dernier livre que j’ai écrit avec Odon Lafontaine « La Laïcité mère porteuse de l’Islam ? » dont la couverture représente le Panthéon entouré de quatre minarets. Mais, non, c’était la cathédrale Saint Louis des Invalides.
Des bruits de martèlement de bois se font immédiatement entendre. La statue de Napoléon était descendue de sa niche, et donnait de grands coups de pieds dans la porte de la cathédrale. Celles-ci finirent par s’ouvrir. Telle la statue du Commandeur, l’empereur s’avança dans la nef, et s’arrêta devant la chaire face au muezzin d’occasion qui se tut. « Descends d’ici et tais toi, et surtout quitte vite ce lieu avec tes complices, ce n’est pas pour cela que j’ai signé un concordat avec le Pape. D’ailleurs ta religion n’en fait pas partie dans les articles organiques ! ». Puis marchant droit vers l’ambassadeur du Kosovo, il lui dit « Sors d’ici, tu n’es plus personna grata en France. Retourne chez les turcs tes maîtres. Ce n’est pas parce que j’ai parlé aimablement avec Suleiman, comme tu as pu le lire dans le Moniteur du 27 novembre 1798 (1) que tu as le droit d’être grossier en France et de nous faire des farces de mauvais goût. ». L’excellence s’enfuit à toutes jambes.
Cherchant du regard qui il pourrait encore interpeller, l’empereur aperçut l’ombre de Fouché dans un coin de la cathédrale. Je suis donc toujours en plein cauchemar. Il marcha droit vers lui « Duc d’Otrante que faites-vous là ? Je vous croyais en enfer, car je ne vous ai pas rencontré au purgatoire. ». « Et bien non Sire, Dieu a eu pitié de moi mais m’a quand même imposé une purification très dure et cependant, parce qu’il aime la France, il m’a donné une permission de sortie temporaire pour vous aider dans votre enquête. ». Napoléon, un peu éberlué « C’est vrai que dans la police vous étiez plutôt bon…. quand vous ne me trahissiez pas ! Bref dites moi au sujet de ce qui se passe ici, quel « coglione. » a permis cette offense à l’honneur français ? Ou y aurait il encore des jacobins sacrilèges comme Chaumette, Hébert, et vous même à une certaine époque ? ». « Oui, mais là ce n’est pas eux, ne recommencez pas votre erreur suite à l’attentat de la rue Saint Nicaise ! La cathédrale appartient au musée de l’armée. C’est là que l’autorisation a été donnée. ». « Oui, mais il y a tout de même un évêque, c’est peut-être un Préfet violet à qui cette république a pu rogner les ongles des pattes, mais c’est un Préfet tout de même et il doit forcément avoir des pouvoirs de condamnation d’un tel acte ! Je ne suis pas un expert en religion catholique, mais je sais qu’il existe des actes de réparation. Vous le savez mieux que moi, Fouché qui fûtes oratorien. ». « Oui Sire, il a effectivement jeté beaucoup d’eau bénite dans toute la cathédrale le jour de la messe de l’Ascension, en particulier sur la chaire. Il a même dit des prières spéciales selon le site internet du diocèse, mais la presse n’a donné aucun détail. Elle a même été plus que discrète. ». Napoléon sourit « Très exactement comme à l’époque où vous en assuriez la surveillance ! ». « Oui, dans ce genre là, mais je n’avais jamais obtenu de tels résultats ! ». « Emmène moi alors voir les vrais responsables, la répression des blasphèmes n’est pas ma tasse de thé, c’est l’affaire de l’évêque et j’espère qu’il sera à la hauteur, mais toute cette histoire fait désordre et peut casser le moral de nos soldats. Et là dessus, je m’y connais.» répliqua l’empereur à son fantomatique ministre de la police. Ils disparurent et j’entendis un ange placé sur la niche laissée vide par l’empereur : « un général dit ses quatre vérités à une collaboratrice qui, derechef, est licenciée et retourne à ses fourneaux ! Il écrit une lettre d’excuses à l’évêque et lui demande de la rendre publique !
Ensuite Fouché entraîna Napoléon devant Notre Dame de Paris. « Sire, cette cathédrale a failli disparaître sous un incendie ! ». Quoi, la cathédrale de mon sacre, la cathédrale de la France où, grâce au manteau que je portais ce jour, les abeilles de Chilpéric, père de Clovis sont entrées, le Pape lui-même décorait le chœur. Il n’y a donc que des coglioni en France ? ». Fouché répondit « les autorités parlent d’un accident et la police enquête. ». « De la même manière que vous enquêteriez ? ». « Oh oui sire. ». Napoléon se tut et grimaça face à Fouché, puis il regarda la cathédrale et son échafaudage, il demeurait plus que pensif. Le passé défilait devant ses yeux jusqu’à sa jeunesse, ses débuts dans l’artillerie, à commencer par ses études sur les explosifs. Soudain, prenant Fouché par le coude, il lui dit : « ils ont eu tort de guillotiner Lavoisier, puis regardant, avec un œil d’expert la charpente dévorée par l’incendie il ajouta: « Un état a besoin de savants , de chimistes en particulier, moi au moins j’ai été membre de l’Institut. Retournons à notre purgatoire. »
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L’empereur regagna sa niche, dominant la cour d’honneur des Invalides, d’où il allait continuer à devoir écouter jusqu’au jugement dernier les discours de ses successeurs. Et Fouché le sien, pour entendre des messes en boucle tous les jours, accompagnées de cantiques des années 1970, afin de se préparer à catéchiser Christiane Taubira et la convertir, le jour où elle viendrait le rejoindre
Le cauchemar cesse enfin. Je me réveille me promettant de célébrer des messes pour le repos des âmes de Napoléon et de Fouché, et surtout d’indiquer qu’on en dise beaucoup pour moi, afin de ne pas connaître un sort analogue, le Seigneur ayant beaucoup d’imagination. [ Publié par Michel Janva le 3 juin 2019 sur " Le salon beige " ]