Résister au nouveau totalitarisme !
5/5 Les 4 Vérités Hebdo N° 896 Vendredi 14 juin 2013
- Vous avez consacré une université d'été à la démocratie totalitaire. Ces deux termes
ne sont-ils pourtant pas antinomiques ?
L'association peut effectivement sembler paradoxale, tant nos esprits sont habitués à définir la démocratie comme le règne de la liberté et le contraire du totalitarisme. Mais ce qui caractérise le totalitarisme, ce n'est pas l'absence d'élection, ni la violence policière. C'est l'idée qu'il n'y a rien au-dessus de l'autorité de l'État. On observe que les démocraties modernes prétendent régenter des domaines qui ne devraient pas relever de l'État : l'éducation des enfants, la morale (avec la prohibition d'un nombre croissant de "phobies", la répression de paroles jugées attentatoires au politiquement correct, etc), la définition de la vie ou de la famille ... Le totalitarisme, au XXle siècle, a pris un nouveau visage. Comme l'avait pressenti Tocqueville, il est en apparence "prévoyant et doux", Il n'en partage pas moins avec ses devanciers le projet d'étouffer en nous toute indépendance d'esprit.
- Vous affirmez, avec saint Augustin, que la démocratie n'est acceptable qu'à la condition que le peuple soit capable de poursuivre le bien commun. Comment le peuple pourrait-il poursuivre un autre bien ?
L'histoire nous montre qu'il arrive, et même souvent, que la volonté d'une majorité soit abusée. Elle peut être aveuglée par ses passions, flattée par des démagogues... La démocratie moderne donne de ces errements maints exemples. D'autant plus que les moyens de communication mettent désormais à disposition du pouvoir et des lobbies des moyens de manipulation des esprits d'une puissance sans précédent.
- Vous distinguez, à l'école de Jean Madiran, démocraties moderne et classique. Quelles sont les différences qui justifient cette opposition ?
La démocratie classique est un mode de désignation des gouvernants par l'élection. La démocratie moderne, celle dans laquelle nous vivons, celle qui a été façonnée par les Lumières, par les principes de 1789, fonctionne en apparence comme la démocratie classique. En réalité, elle est tout autre chose. On y jugera qu'un gouvernement est bon, non plus dans la mesure où il poursuit le bien commun, mais dans la mesure où il est démocratique. Par ailleurs, la loi y "est l'expression
de la volonté générale". Et seulement cela. Elle doit être approuvée par la majorité. Elle n'a besoin que de cela pour être incontestable. On passe d'un souverain (individuel ou collectif) à qui l'on reconnaît le pouvoir de dire : je le veux, parce que c'est juste, à un souverain (collectif) qui dit : c'est juste, parce que je le veux. La conséquence de ces deux dispositions est que, loin de nous en préserver, la démocratie moderne tend naturellement au totalitarisme du seul fait de ses principes.
Il n'y a plus rien au dessus de la volonté du souverain, parce que c'est une volonté
démocratique. Comment résister à ce nouveau totalitarisme ? A vue humaine, il y a
longtemps que ce combat paraît perdu. Mais la chute du mur de Berlin l'a montré : il y a une fragilité constitutive du mensonge, une force intrinsèque à la vérité. La vague de fond soulevée dans tout le pays par la loi sur le mariage homosexuel n'a pas seulement surpris le gouvernement. Elle nous a stupéfaits nous-mêmes. La force tranquille des manifestants, face au mensonge d'État, à la diffamation, aux violences policières, aux gardes à vue injustifiées, a transformé l'adoption de la loi en défaite pour ses propres partisans. Sans doute la contestation s'est-elle achevée sur un échec, puisque la loi est entrée en vigueur. Reste que l'espoir a changé de camp. La course à la décadence a cessé de paraître irrésistible. Il nous reste à prolonger ce magnifique sursaut, cet étrange printemps français, par une reconquête culturelle du terrain qui a été perdu depuis plus de quarante ans.
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Le totalitarisme ?
5/5 Renaissance Catholique
Le totalitarisme ne se caractérise pas essentiellement par la violence, la privation des libertés formelles (celles de parler, d'aller et venir), le rejet des procédures électives. Il y a des élections en Chine. Il y en avait en Union soviétique. Le totalitarisme se définit, comme son nom l'indique, par la prétention de l'État à régenter tout : la vie sociale, économique, spirituelle tout autant que la vie politique. Il peut le faire par la violence ou par la persuasion, le lavage de cerveau, la douceur apparente. Ce qui le caractérise, ce n'est pas l'absence d'élections pour la désignation des dirigeants ; ce n'est pas non plus la violence policière. C'est la contestation de toute liberté intérieure, l'idée qu'il n'y a rien au-dessus de l'autorité de l'État - ni autorité supérieure, ni principe transcendant - qui justifierait que la personne, la famille, la communauté professionnelle refusent une soumission inconditionnelle et totale, qu'elles se réclament d'un ordre, d'une autorité, de principes, de traditions sur lesquels l'État n'aurait pas de prise. Le totalitarisme ce n'est pas le règne de la police (qui peut dans tout État commettre des abus). C'est la prétention de l'État à régner sur les âmes elles-mêmes.
Ce totalitarisme s'est montré à nous dans le nazisme et le communisme sous son visage violent, brutal, criminel. Cela a pu conduire à le confondre avec la dictature. Or il y a eu dans l'histoire nombre de régimes de force, qui ne tiraient pas leur origine d'une élection régulière et pratiquaient à l'égard de leurs opposants une répression policière peu soucieuse de la liberté d'expression - ce qui a conduit à les définir comme des dictatures - sans pour autant qu'on puisse les considérer comme totalitaires, dans la mesure où ils ne visaient en aucune manière à régir les consciences non plus qu'à assujettir les familles, l'Église ou les corps intermédiaires (la cité, la profession, l'entreprise), mais seulement à imposer la suprématie de l'État dans son propre domaine, celui des fonctions régaliennes (la police, la justice, la diplomatie et la guerre).
<p align="right">Michel De Jaeghere <a href= http://www.renaissancecatholique.org/ target=_blank>www.renaissancecatholique.org</a>