"Voici l'homme." Pilate a cru ne dire que cela. Mais est-il dans son propre secret ? Peut-il se douter que ces deux mots nonchalamment jetés marquent la plus grande révolution de l'histoire ? L'idée de l'homme va changer. D'une parole, quelquefois, ébranlant l'air au-dessus de soi, un passant peut déclencher l'avalanche qui dénude, comme à un signal, toute l'étendue des montagnes. Ainsi, en ce sombre matin de mars et dans cette lointaine Judée, le Procurateur annonce la face nouvelle des temps : le commencement de l'ère vraiment humaine. Ici, aujourd'hui, pour toute la terre, elle s'ouvre. Les deux mots sans importance de Pilate proclament le seul fait important de l'histoire: l'avènement de la véritable humanité.
Ce n'est pas à la croix que se termine le chemin de la croix, pas à la mort sur la croix, ni à l'ensevelissement dans le sépulcre. Pas même à la Résurrection, dans le jardin, en ce matin plein d'aurore de la Pâque. Mais à l'Ascension du Christ, à Béthanie : premier corps glorieux, prophète et roi du Règne, il ouvre le royaume où la vie humaine divinisée entre dans la gloire. La face levée, les fidèles le regardent qui s'élève au-dessus de ce monde, triomphant et de la pesanteur et de la mort. Car le poids et la chute, la peine et l'anéantissement, ne sont pas la vérité : la vérité, c'est la montée, et c'est la joie dans la lumière. Tout l'univers va à cette victoire qui passe l'espérance.