Dans L'Avant-guerre civile, son précédent ouvrage paru en 1998, Eric Werner décrivait les relations ambiguës qui se sont progressivement instituées, ces dernières décennies, entre le pouvoir et le désordre. Il reprend ici ce même thème en l'enrichissant de considérations nouvelles. Le présent ouvrage rassemble un certain nombre d'études, certaines inédites, les autres ayant déjà fait l'objet d'une première publication, mais reprises et retravaillées, toutes centrées sur la question de l'évolution actuelle du régime occidental et de sa nature profonde. S'appuyant sur les principaux éléments de la théorie totalitaire, telle qu'elle a été formulée il y a une cinquantaine d'années par Hannah Arendt et d'autres, Eric Werner observe que nombre de ces éléments sont aujourd'hui directement applicables au régime occidental. Il souligne par ailleurs la corrélation entre le déclin actuel de la démocratie et celui de l'État-nation. La démocratie moderne est apparue en Europe à l'époque même où les États-nations commençaient à prendre forme, rien d'étonnant dès lors à ce que la fin de l'État-nation coïncide avec celle de la démocratie. Un autre type de régime s'est aujourd'hui substitué à la démocratie, peut-être mieux adapté aux exigences d'une société qu'on pourrait qualifier d'éclatée. La transition s'est d'ailleurs faite en douceur, sans heurts excessifs, grâce à l'inlassable travail d'"explication", tendant à l'anesthésie collective, des dirigeants et de leurs "communicateurs". Résultat de cette pédagogie aujourd'hui, au-delà des problèmes de confort et de survie au jour le jour, personne ne s'inquiète plus de rien. La réflexion de l'auteur se prolonge en fin de volume par trois études respectivement consacrées à Proust et Ernst Jünger, au travers desquelles il essaye de dessiner quelques voies de résistance pratiques.
Eric Werner est diplômé de l'Institut d'Études politiques de Paris et docteur ès Lettres. Il a déjà publié, à L'Age d'Homme, Mystique et politique (1978), De la Misère intellectuelle et morale en Suisse romande (1981, avec Jan Marejko), Le système de trahison (1986), Montaigne stratège (1996) et L'Avant-guerre civile (1998).