Né à Bourges vers 1395, Jacques Cœur est généralement présenté par les historiens comme un "homme d'affaires", un "marchand" auquel son esprit d'entreprise valut de se voir confier de hautes charges par Charles VII. Or, Jacques Heers démontre que, dans tous les domaines, Jacques Cœur agit non pour son propre compte, mais au nom du roi.
Jacques Cœur est avant tout un grand commis qui apparaît comme un pionnier de l'étatisation des affaires ou du moins d'un contrôle d'Etat sur toute forme d'activités. Il multipliait les titres, à la fois argentier du roi, maître des monnaies, receveur des taxes de sel, commissaire aux Etats du Languedoc, ambassadeur à l'occasion. Abusant certainement de sa position pour s'enrichir, il contribua puissamment à la reconstruction du royaume et de l'Etat, à la remise en ordre monétaire de ses finances et de son économie et aussi à la reprise de la Normandie aux Anglais, par ses prêts d'argent et ses fournitures d'armes...
Il ne pouvait manquer de s'attirer des adversaires et il tomba, victime d'une cabale qui, à défaut de réussir à l'accuser d'avoir empoisonné Agnès Sorel, put le convaincre de fraude et de corruption. Condamné à la prison à vie, il s'évada et trouva protection en Provence, puis auprès du pape. Il mourut en 1456 dans l'île grecque de Chio, au cours de la croisade avortée, lancée par le pape Calixte contre les Ottomans après la chute de Constantinople (1453). Se fondant sur les documents pour faire la part entre la légende et la connaissance exacte, Jacques Heers renouvelle la vision que l'on a généralement de Jacques Cœur, un des grands hommes d'Etat du siècle.
Jacques Heers, professeur honoraire à la Sorbonne (Paris IV), a notamment publié : Le Moyen Age, une imposture, La Première Croisade, Gilles de Rais et Les Négriers en terres d'islam.