Romancier inimitable, épistolier au long cours, essayiste, éditeur, Jacques Chardonne est un de ces classiques souterrains qui font l'honneur de la littérature française. Son oeuvre, en marge des courants contemporains, fut saluée par plusieurs générations de critiques et d'écrivains. Il comptait parmi les auteurs préférés de François Mitterrand et le général de Gaulle louait volontiers son style.
Il connut le monde des lettres de l'entre-deux- guerres, le tohu-bohu des années quarante, le charme de l'ermitage, la compagnie de jeunes admirateurs comme les Hussards. Conservateur, il préférait la douceur de vivre au battement sourd du progrès. On le disait ennuyeux ; il était subversif il parlait mariage, bonheur provincial et paix bourgeoise. Le vague à l'âme du monde l'indifférait ; il goûtait mieux les paysages, les femmes, le cognac.
Il travaillait à son jardin et à sa phrase avec la même exigence. Ecrivain classique, Chardonne était un précurseur : le couple, en littérature, c'est lui. A cause d'une certaine rigidité doctrinaire, son oeuvre fut marginalisée. Elle l'est encore aujourd'hui, La postérité, fille ingrate, a retenu un voyage malheureux en Allemagne, en 1941, plutôt que la grâce de son style. Il eut une mort discrète et pudique, à son image.
Ce ""Qui suis-je ?" Chardonne vise à restituer l'art de vivre et d'écrire chardonnien à la lumière de son existence et de son oeuvre.