Du début de la Seconde Guerre mondiale jusqu'à nos jours, l'histoire des parachutistes français épouse étroitement l'histoire de la France. L'épouse mais ne se confond pas avec elle. L'armée est l'image de la nation, une image de la nation, elle n'est pas la nation. Comme la carapace de la tortue, l'épée de l'espadon, tout en étant sécrétés par leurs organismes, ne sont ni la tortue ni l'espadon.
Sans rien retrancher de l'estime qu'ils éprouvent pour leurs frères des autres armes, sans éprouver un orgueil qui pourrait leur laisser prétendre à un rang supérieur à celui du reste de leurs concitoyens, les parachutistes ont cependant conscience d'avoir joué au cours de trois guerres et lors de conflits - qu'à tort on appelle mineurs - un rôle primordial. D'avoir eu le mérite et la chance - mais la chance ne se mérite-t-elle pas ? - de se trouver partout et toujours à la pointe des combats. Nous disons bien des combats, car ceux-ci revêtirent les formes les plus diverses : les raids à longue portée sur les arrières de Rommel, les mêlées furieuses pour la libération de Colmar, les feintes et les traquenards d'Indochine, l'hécatombe dantesque de Diên Biên Phu, les pièges des Némentcha et de l'Atlas, et surtout - oui surtout, bien qu'en ce domaine le rôle essentiel n'ait pas été confié aux Paras - la bataille pour l'éducation, le bien-être et la paix dans l'Algérie tout entière.
Au reste, le sujet de ce livre s'avère tout à la fois immense et modeste. Modeste parce que l'auteur a limité son ambition au domaine strictement militaire. Immense parce qu'il a cherché à rendre compte de la totalité des opérations menées par les troupes aéroportées françaises, qu'elles aient mis en jeu une humble section ou des régiments entiers. Qu'elles aient été réellement aéroportées ou non. Car c'est plus que le parachute qui fait le parachutiste.
Le signataire de l'Histoire des parachutistes français, ouvrage auquel tant de camarades ont collaboré, est le colonel Henri Le Mire dont la carrière a commencé avec la Seconde Guerre mondiale et s'est achevée avec la fin de la guerre d'Algérie. Breveté parachutiste en 1948, il a connu ou, au moins, approché la plupart des officiers ayant eu quelque part importante dans cette histoire. Il a servi sous les ordres directs des colonels et généraux de Bollardière, Massu (àplusieurs reprises), Gilles, Ducournau, Gracieux, Fourcade, Chateau-Jobert, Brothier, Ducasse, Godard, dont tous l'honorèrent de leur amitié, ainsi que le firent ses camarades plus jeunes ou plus âgés : Mayer, Botella, Touret, Faulques, Saint-Marc, Masselot, Robin, Legrand. A cette liste si incomplète, il convient d'ajouter le général Vanuxem dont le rare talent permit aux régiments paras de remporter, sur la frontière orientale de l'Algérie, une série impressionnante de victoires.