150.000 français éparpillés !
5/5 Ambiance de Paris.
.----. L'AUTEUR :
G. de Diesbach, né en 1931, a écrit une quinzaine d'ouvrages dont la moitié sont des livres d'histoire, ainsi "Madame de Staël" en 1983 (Bourse Goncourt)
L'OEUVRE :
L'auteur nous donne les causes de l'émigration : "La passivité de Louis XVI devant le désordre", d'où un sentiment d'impuissance des nobles à résister aux violents qui pillent et tuent. Il nous introduit à l'intérieur "de toutes ces petites communautés françaises".
Comment et de quoi vivaient les émigrés ? Quelles étaient leur façon de penser, leurs occupations, leurs préoccupations ? Pour le savoir nous voyageons dans une douzaine de pays, d'où une douzaine de chapitres. Le tout est éclairé par de nombreuses citations de lettres, de journaux et autre documents de l'époque. Une quarantaine de reproductions de portraits et de scènes se rapportant à l'émigration illustrent intelligemment le texte. Un index final de plus de mille noms donne une idée de l'immense travail réalisé par l'auteur.
CONCLUSION :
Cet ouvrage est le film saisissant de la "grande tragédie humaine qui éparpilla en Europe 150.000 Français presque sans ressources. Il est bien composé : on passe d'un plan à un autre sans heurt par un agréable fondu-enchaîné. Les acteurs sont devant nous avec leurs illusions, leurs erreurs, leurs vices, mais aussi leur générosité et leur sens de l'entr'aide. Un ouvrage d'un grand intérêt..
[ Signé : Yves Rousselot, extrait de "Ambiance de Paris" , 1984 ]
Il préfère l'anecdote à la statistique .
5/5 Plaisir de Lire .
.----. L'histoire de l'Emigration nous explique l'auteur dans son premier chapitre, a déjà fait l'objet de plusieurs ouvrages, mais Ghislain de Diesbach ne se présente pas quant à lui, comme un sociologue ou comme un économiste . Il préfère l'anecdote à la statistique .
S'appuyant sur un nombre impressionnant de documents cités à la fin du volume, il nous fait connaître la mentalité, les intrigues, les épreuves de cette foule de Français qui quittèrent tout par fidélité à leur roi et à leur foi .
Sous l'Ancien Régime en effet, la fidélité des citoyens s'entendaient d'abord à l'égard de la personne royale . Les vrais "patriotes" n'étaient pas des gens des clubs, ni des tenants de la subversion mais bel et bien les soutiens de la monarchie qui tentaient d'agir pour la sauver .
L'histoire de ces émigrés est une histoire complexe dont les fils se nouent non seulement dans les pays voisins de la France mais jusqu'en Amérique et même au Siam !
On se passionne pour les aventures incroyablement pittoresques et diverses de ces privilégiés devenus en un moment des parias sans ressources .
Ils ne trouvèrent en général qu'un accueil réticent - pour ne pas dire plus - dans les différents pays où ils durent s'exiler . D'autre part, convaincus d'incarner la fleur de la civilisation, ils garderont au milieu de leurs épreuves leur frivolité et leur arrogance à l'encontre de ceux qui bon gré - mal gré leur offraient l'hospitalité .
Les débuts de l'Emigration voient se préciser les conditions d'un soulèvement contre révolutionnaire .
La pusillanimité du Roi, pour lequel l'auteur est très sévère - fera échouer cette tentative .
Nous suivons les pérégrinations des émigrés à travers la Hollande ridiculement vertueuse, l'Angleterre où renaît une vie de salon, les Allemagnes dont les Princes se vengent des affronts reçus à Versailles, l'Autriche particulièrement hostile, l'Italie, l'Espagne, le Portugal... C'est la Russie qui leur fit le meilleur accueil : outre les seigneurs, une véritable colonie s'y installera qui tirera ses ressources de son travail : peintres, pâtissiers, acteurs, coiffeurs, cuisiniers . Le duc de Richelieu sera en Crimée un gouverneur adoré et un fondateur de ville . L'Amérique attirera ceux qui croyaient y trouver la patrie du "bon sauvage" cher à Rousseau ; ils furent cruellement déçus par la vulgarité et l'esprit de lucre de ses habitants .
La chute de Robespierre, puis le Consulat amorcent le mouvement de retour . Le concordat de 1801 rend à la France la quasi totalité du clergé émigré .
Avec les années l'image de la France s'était embellie des rigueurs mêmes de l'exil . Mais le retour devait réserver d'amères désillusions . Un dernier carré d'émigrés restera en Angleterre autour des Princes et aussi en Russie ; au moment des guerres napoléoniennes, il y aura des français des deux côtés . Après la Restauration, les émigrés seront "des émigrés de l'intérieure" des hommes qui restent fidèles à leurs traditions .
Cette étude très fouillée, un peu longue, se lit sans ennui . Elle est un complément nécessaire à l'histoire de la Révolution où le sujet est toujours sommairement traité .
POUR QUI CE LIVRE ? ;
: pour tous à partir de 18 ans, à condition de n'être pas rebuté par 579 pages . [ Notice rédigée à partir de l'édition de 1975 aux éditions Grasset . " Plaisir de Lire " , numéro 34 , Pâques 1976 ]
Prier le 21 janvier !
5/5 Souvenir de Chateaubriand .
.----. Des attachements se formaient dans les causeries du soir après le travail, sur les gazons d'Hamstead et de Primrose-Hill.
A des chapelles, ornées de nos mains dans de vieilles masures, nous priions le 21 janvier et le jour de la mort de la Reine, tout émus d'une oraison funèbre prononcée par le curé émigré de notre village. Nous allions le long de la Tamise, tantôt voir surgir aux docks les vaisseaux chargés des richesses du monde, tantôt admirer les maisons de campagne de Richmond, nous si pauvres, nous privés du toit paternel : toutes ces choses sont de véritables félicités ! [ Extrait de Chateaubriand " Mémoires d'Outre-Tombe "; livre sixième , prologue , page 196 de l'édition La Pléiade, Tome 1 de 1951 ]