+ 8 p. photos. Cette congrégation est plus connue actuellement sous le nom des "Dominicaines enseignantes de Fanjeaux". Elle fut fondée en 1801 au lendemain des années noires de la révolution en se donnant pour mission l´éducation des jeunes filles pauvres. Elle fut ensuite affiliée en 1885 à l´ordre dominicain. « Pourquoi coupler ces deux livres dans une même rubrique ? Parce que le deuxième fait suite au premier : il s'agit de l'histoire de la même congrégation, le Saint-Nom-de-Jésus de Toulouse, devenue (nous verrons comment) le Saint-Nom-de-Jésus de Fanjeaux. « Pourquoi donner tant d'importance à une petite congrégation féminine comme il y en eut tant au XIXe siècle ? Comme dit Jean de Viguerie dans sa préface, parce que, à travers l'évolution de cette congrégation, " c'est toute l'histoire religieuse des XIXe et XXe siècles qui est évoquée ". « L'introduction commence par un trait d'humour : " Il y a, paraît-il trois choses que le Bon Dieu lui-même ignore : ce qu'un dominicain va dire lorsqu'il monte en chaire, ce qu'un jésuite a dit lorsqu'il en descend, et le nombre exact de congrégations féminines autorisées. " « Puis sérieusement cette introduction continue : " Nous voudrions savoir comment une si petite congrégation, d'apparence commune - voire banale - a pu survivre en contradiction manifeste avec toutes les évolutions d'une société dont elle se voulait pourtant une cellule active. Observer la congrégation du Saint-Nom-de-Jésus, de 1800 à 1950, permet de comprendre que le mot " contradiction " recouvre, pour celle-ci, tous les grands combats politiques et sociaux du XIXe et de la première moitié du XXe siècle : luttes religieuses qui s'acheminent peu à peu vers la séparation de l'Église et de l'État ; guerre scolaire dont l'issue ne laisse que peu d'espoir aux écoles confessionnelles ; marche conquérante vers une certaine " libération " de la femme, comprise par les républicains comme une émancipation radicale du contexte religieux dans lequel la femme avait toujours évolué. " « C'est ce que l'auteur nous raconte au long des cinq cent vingt pages du premier volume, depuis les origines au sortir de la Révolution jusqu'à la réforme de 1953 en passant par l'affiliation à l'ordre dominicain en 1883 ; il a fallu en traverser des tourmentes ! Prenons l'exemple de 1905 où la supérieure (Mère Hélène) prit la décision de quitter l'habit religieux et de mettre une directrice laïque pour garder l'institution ; ainsi, avec l'aval du pape saint Pie X qui lui écrivit ceci : " L'âme des petits enfants de France vaut bien les sacrifices héroïques consentis en leur faveur " (page 271, chapitre intitulé : " La survie "). Ainsi la congrégation devint-elle pour un temps " le cours Bertrand ". « Toute personne qui s'intéresse à l'histoire, à l'histoire de l'Église et à celle de l'enseignement en France trouvera dans cet ouvrage les réponses à ses questions dans un exposé aussi clair que complet. * « Passons au deuxième volume " Rupture ou Fidélité ". Après un court rappel historique et une présentation de la réforme de 1953 (qui est bien sûr traitée dans le premier volume) on assiste à la lutte, au combat qui fut celui de Mère Anne-Marie Simoulin pour garder la congrégation du Saint-Nom-de-Jésus dans la tradition catholique. « Dans sa préface, Jean de Viguerie présente l'ouvrage : " Nous avons là une étude sans précédent. L'histoire de la crise de l'Église pendant les années conciliaires n'avait encore produit rien de semblable, rien d'aussi détaillé, sur une longue période, soit le récit jour après jour de l'histoire d'une congrégation religieuse affrontée à cette crise, luttant pour demeurer fidèle à sa vocation et à ses constitutions, persécutée sans cesse, persécutée à mort, on peut le dire, et finalement contrainte d'entrer en dissidence. Depuis le début de la tourmente conciliaire jusqu'à nos jours, les revues et bulletins de tendance traditionnelle ont mentionné souvent des noms de curés démis de leurs fonctions, de religieuses exclaustrées, de laïcs défunts ayant exprimé en vain dans leurs dernières volontés leur souhait que la messe de rite tridentin soit célébrées à leurs obsèques. Mais il s'agissait presque toujours de cas isolés. Nous avons ici pour la première fois le récit continu et détaillé d'un quart de siècle de persécutions infligées à un institut religieux. Dans l'historiographie de la crise, l'ouvrage fera date " (page 9). « La construction du livre est très logique : après un bref rappel historique, un point sur la finalité d'un ordre religieux, on arrive à l'exposé en trois parties des évènements qui se résument en ces mots : " Rupture ou Fidélité ? " « L'auteur présente son œuvre : " Pour répondre à cette question, nous avons voulu écrire les pages qui suivent, non à la façon d'un simple récit historique, mais comme une réflexion sur les causes des évènements, sur leur enchaînement et sur leur lien avec le passé de la Congrégation " (page 16). « Voilà qui est très intéressant : nous avons une véritable réflexion sur cette crise que nous traversons depuis un demi-siècle à partir de l'exemple de cette congrégation qui a dû rompre par fidélité. Si le combat de Monseigneur Lefebvre est bien connu, celui de Mère Anne-Marie l'est beaucoup moins. Elle a lutté sur tous les fronts et est à peu près la seule à avoir vu la nocivité de la « carte scolaire » qu'elle a toujours refusée. Le présent ouvrage lui rend, sans le dire d'ailleurs, l'hommage qui lui est dû. « Nous citerons une lettre que Sœur Alice-Marie mentionne deux fois dans son ouvrage et qui figure sur la quatrième de couverture : " (...) quand nous paraîtrons devant le Seigneur, je n'aurai à répondre que de moi, de mon gouvernement pendant cette époque déchirée et déchirante, et du service des âmes des enfants qui nous aurons été confiées. J'aurai beau répondre que je n'ai volontairement sacrifié des âmes d'enfants que par obéissance à tel ou tel directeur diocésain, je n'en serai pas moins coupable et rien ni personne ne me viendra en aide pour justifier mes complicités... Malgré tout ce qui nous sépare, je vous redis, Excellence, ma volonté de ne servir que Jésus-Christ, même dans votre diocèse. (...) Avec la certitude que le Seigneur qui a souffert et qui souffre en chacun de nous, par nous, avec nous et pour nous, est définitivement ressuscité, je prie pour que cette douloureuse passion que traverse l'Église à l'heure actuelle débouche sur la vie, la lumière et la vérité qui est le Seigneur Jésus-Christ. " (c'est au sujet de la carte scolaire que Mère Anne-Marie a adressé cette lettre en mars 1970 à Mgr Barthe, évêque de Fréjus-Toulon). « Ce combat fut-il utile ? Fut-il gagné ? Les chiffres répondront : « La Congrégation comptait en 2016 214 sœurs, 1670 élèves, seize maisons dans trois pays dont douze en France. « Les livres que nous venons de présenter constituent à eux seuls une pièce à verser au dossier pour juger de l'enseignement des Sœurs du Saint-Nom-de-Jésus : l'auteur de ces deux livres, modèles de clarté, de logique, de rigueur historique et d'élégance dans le style, a montré sans chercher à le faire l'efficacité de la méthode des sœurs du Saint Nom-de-Jésus de Fanjeaux ! » Juliette Colange, dans Lecture et Tradition nouvelle série, n° 83 (mars 2018) NDLR : Voir aussi l'entretien accordé par Sœur Alice-Marie, paru dans notre n° 69, nouvelle série (janvier 2017)