"... Cétait un soir glacé de novembre. Assis près de la cheminée, je veillais seul dans la salle à manger des Gérauds. Avant de se retirer, le maître de maison avait jeté quelques ceps de vigne sur les grosses bûches de chêne à demi consumées et les flammes rousses et bleues se tordaient devant le contre-coeur armorié en une danse folle.
Le film de la vie de Guy de Larigaudie se déroulait devant moi à mesure que je tournais les feuillets des lettres rassemblées par sa mère : enfance aux Gérauds pendant la grande guerre de 1914-1918, collège parisien, vacances en Périgord, camps scouts, inquiète recherche de sa vocation, maladie, chaise longue à Villard-de-Lans, griserie du ski, service militaire dans la cavalerie, responsabilité d'une troupe scoute, travaux littéraires, études de droit, voyages à travers l'Australie, l'Amérique du Nord, les îles du Sud, l'Europe, le Proche-Orient, l'Asie du Sud et du Sud-Est...
Quand je vins à bout du paquet de lettres où je retrouvais à l'état brut bien des pensées d'Etoile au Grand Large, l'imposant silence d'une nuit de gel enveloppait le manoir isolé, le feu se mourait, des ceps, il ne restait que des cendres et des bûches de chêne que des tisons noircis. J'avais pénétré au plus secret du coeur de Larigaudie, je savais que sa plus grande aventure fut spirituelle..." Jean Peyrade