1942...1943... : les plus sombres années de la guerre : rationnement alimentaire, bombardements, toute une population vivant l'oreille collée au poste de radio (la TSF!) pour écouter en secret les nouvelles de Londres.
A la même époque, dans une petite gare de banlieue, à Nogent-sur-Marne exactement, deux bandes rivales de collégiens se chamaillent et s'affrontent régulièrement sur l'étroite passerelle du chemin de fer ; à leur tête, deux gamins batailleurs : l'un portant l'uniforme, appartient à l'enseignement libre, l'autre est élève de l'enseignement public et se moque de ces garçons qui, avec leur bérêt rond, ont l'air de petits moussaillons en goguette. Qui reconnaîtrait ajourd'hui, parmi ces potaches querelleurs, le destinataire de ce volume dans le premier clan, et dans l'autre, l'un des signataires de ce texte ? Et pourtant. ... Plus d'un demi-siècle a passé depuis ce temps et chaque année n'a fait que sceller plus solidement une amitié vite devenue indéfectible...
Cette amitié, nous aimerions tous pouvoir la célébrer plus souvent. Mais Yves Gérard est l'homme éternellement pressé parce qu'il ne saurait refuser le moindre service ou conseil. Évoquer sa silhouette, c'est, en effet, penser à Yves trottinant, toujours chargé de livres et de partitions, s'épongeant le front en murmurant :
"j'arrive, j'arrive... Oui, oui, je suis en retard..." Comment lui en vouuloir ? Sa disponibilité, sa gentillesse, sa délicatesse comme la qualité de son écoute sont légendaires. Sa discrétion aussi. Par pudeur, il déteste se raconter. Et pourtant, ô combien passionnant son itinéraire !