Un coup de revolver retentit dans le bois de Boulogne. Un jeune homme s'écroule sur l'herbe. Que s'est-il passé ? Pourquoi en arriver à ce geste absurde ? La tentation du suicide est une réponse aristocratique et nietzschéenne aux bassesses du monde. Le héros, épris de beauté et d'air pur, gouverné par les sentiments les plus rares, ne conçoit en effet l'existence qu'à la plus haute altitude : "Son suicide s'inscrit dans la ligne de sa manière de vivre, c'est sa dernière élégance", conclut Mourlet. Plusieurs jeunes filles, Evelyne, Luce, Nicole, Martine, traversent la sombre forêt de l'existence du héros et y font comme des trous de soleil. L'adolescence n'est pas toujours l'âge du bonheur, mais elle en a une telle nostalgie, une telle exigence, que cela peut mener loin. Parfois jusqu'au bois de Boulogne, dans l'herbe mouillée de rosée, un matin d'avril.
Plus de soixante ans après sa première édition, ce drame parlera d'autant plus puissamment aux âmes d'élite qu'il est porté par un style précis, elliptique et tranchant, classique en un mot, qui aura l'effet d'un coup de fouet ou d'un alcool. Il est paradoxalement peu de romans aussi toniques que celui-ci.
Adoubé par Paul Morand et André Fraigneau, Michel Mourlet s'est imposé dans l'esprit des critiques les plus exigeants comme le romancier de la liberté par excellence, doublé d'un styliste hors pair. Auteur dramatique à l'inspiration hautaine, il fut, à la fin des années 1950, le théoricien du mac-mahonisme, cette radicale remise en question visant à arracher le septième art à ses ornières et à le ramener à son essence. Sa bibliographie exhaustive donnera ici une large idée de l'ampleur d'une oeuvre qui est loin d'être close !