L'ambitieux - Le factieux - Le tyran. Premier volume : Premier et deuxième tableaux - Deuxième volume : Troisième tableau. « À travers ces deux brochures, Jean-Baptiste Geffroy réussit l'exploit de nous présenter la vérité sur Charles de Gaulle, de son entrée à Saint-Cyr, en 1909, à l'abandon de l'Algérie en 1962. Cinquante-trois années d'une "aventure gaullienne" que l'auteur a très judicieusement intitulée "une tragédie française" qu'il a découpée en trois tableaux : l'Ambitieux, qui couvre sa carrière militaire ; le Factieux, de Londres à Alger ; le Tyran, de la première (1943-45) à la seconde épuration (1961-62). Trois tableaux d’une vie d’homme : trois tableaux d’une tragédie française. L’ambitieux : comment De Gaulle a construit son personnage. Le factieux : comment De Gaulle a prétendu, face au maréchal Pétain, incarner une légitimité alternative. Le tyran : comment De Gaulle au pouvoir a fait litière des libertés françaises.« De cette longue période, on retiendra deux traits de caractère du "Général" : l'Orgueil et la Haine qui seront le fil conducteur de toute son existence. Un dialogue particulièrement explicite vient donner la clef de la psychologie gaullienne. Il se place avant la campagne de Syrie : "Au futur général Monclar (alors lieutenant-colonel Magrin-Verneret commandant la 13e Demi-Brigade de Légion étrangère), qui déclare à De Gaulle : "Je regrette, je ne marche pas. L'engagement que j'ai souscrit précise que nous ne serons pas engagés contre la France", de Gaulle répond froidement : "La France, c'est moi." » (note 38, page 50). « Dès lors, tout s'explique : attaquer de Gaulle, c'est attaquer la France et ceux qu'il attaque n'ont pas droit au titre de Français. Et parlant des autorités militaires de Vichy qui l'envoient devant le tribunal militaire pour sa rébellion, il déclare : "[...] je dis que ses soldats ne sont plus des soldats ; que ces Français ne sont plus des Français ; que ces hommes ne sont plus des hommes" ! (discours du 22 août 1940). « Ces paroles "terrifiantes" ouvrent la porte à tous les excès qui, hélas, ne manqueront pas... « À partir de cette présentation, il n'est plus qu'à suivre la passionnante enquête de l'auteur dans ces trois périodes où l'on découvrira qu'il y a loin du mythe à la réalité. Tout d'abord, l'Ambitieux : sa période militaire qui va de Saint-Cyr, 1909, à la bataille de Montcornet, mai 1940. À travers les notes de ses chefs apparaît un homme arrogant, d'une brillante intelligence, mais d'un esprit plus théorique que pratique. Notons toutefois qu'il jouira de la bienveillante protection du colonel puis maréchal Pétain jusqu'à la fin des années 30. Pour impressionner le monde politique, il commet plusieurs ouvrages et articles sur l'Armée, recueils de généralités, où, contrairement à la légende, il n'a pas la paternité de la doctrine de l'emploi des chars. Mais il est remarqué par Paul Reynaud qui, après l'échec de Montcornet, en mai 40, l'appellera au gouvernement comme secrétaire d'État à la Défense. Adversaire de l'Armistice, qu'il travestit sciemment en capitulation, partisan de la guerre à tout prix, il propose, dans un déni total de la situation militaire, la construction d'un "réduit breton", puis l'embarquement de 900 000 hommes en 45 jours vers l'Afrique du Nord. Enfin, envoyé à Londres par Reynaud, dont la duplicité est mise à nu, il en revient avec une ahurissante proposition de fusion de la France, avec ses ressources, et de la Grande-Bretagne. « Devant le tollé qu'il provoque, il s'enfuit, par ruse, en Angleterre, le 17 juin, d'où il prononcera, le 18, son célèbre appel, soumis auparavant à Churchill. Dès lors, il est devenu le Factieux et n'a de cesse de combattre le régime de Vichy, y compris par les armes. Ses propos virulents serviront de caution à Churchill pour l'attaque de Mers-el-Kébir. C'est lui qui lancera l'attaque ratée de Dakar puis poussera au conflit fratricide de Syrie. Il réserve ses attaques non pas aux Allemands, mais au Maréchal et à son gouvernement qu'il flétrit d'injures et de calomnies. Le débarquement américain en 1942, l'assassinat de Darlan, dont il est, avec le comte de Paris, partie prenante, l'hostilité de la maréchaliste Afrique du Nord, et la nomination de Giraud comme commandant en chef civil et militaire sont autant d'obstacles à l'arrivée de De Gaulle à Alger. Fort de l'appui anglo-saxon et communiste, de son auréole de résistant, il s'imposera au Comité Français de Libération Nationale (CFLN) face à Giraud qu'il discréditera en l'obligeant à renier sa fidélité maréchaliste et à laisser faire l'épuration de ses proches (exécution de Pucheu, entre autres). "Après un an de basses manœuvres [...] de Gaulle détient seul le pouvoir. Il s'engage résolument sur le chemin de la tyrannie". * « Voici donc le Tyran. De Gaulle a éliminé ses rivaux : il se proclame chef de la France Combattante "mais l'armée dont il se saisit n'est pas la sienne. L'Armée d'Afrique est celle de Vichy, celle de Weygand" Ce sont Giraud et Juin, mis en place par le Maréchal, qui vont mener les campagnes de Tunisie, de Corse et d'Italie. Et de Gaulle n'est pour rien dans ces victoires. « Mais il est en contact avec Moscou depuis juin 1941, car il veut l'appui du PCF. Staline accepte à condition qu'il serve ses intérêts, à savoir la création d'un front à l'Ouest pour le soulager à l'Est. Jean-Baptiste Geffroy démontre alors, à travers faits et citations, combien, à force de concessions, de Gaulle est l'otage de Moscou. C'est ce qui va conduire à placer la Résistance sous la coupe des FTP de Tillon qui mènent une politique terroriste, qu'il avait, auparavant, condamnée, et qui va le contraindre à prôner l'insurrection nationale, c'est-à-dire la révolution. C'est le feu vert pour les communistes qui vont se livrer aux pires exactions contre leurs adversaires politiques, opportunément qualifiés de "collabos". « Vient ensuite l'analyse fouillée de la manipulation juridique, anticonstitutionnelle, montée pour asseoir la tyrannie gaullienne. Le vrai visage de De Gaulle se révèle : c'est celui d'un "épurateur assumé" : il a besoin, pour sa légitimité, que l'Armistice, travesti en capitulation, soit une trahison, sinon c'est Pétain qui a raison, et lui n'est plus rien. Épuration sauvage, dans un premier temps, puis "légale" par des tribunaux spéciaux et particulièrement partiaux. Là encore, la lecture de ce troisième tableau est accablante. Les condamnations pleuvent : 30 000 exécutions sommaires, selon Robert Aron, puis plusieurs milliers de condamnations à mort, 100 000 "indignité nationale". D'après Jean Paulhan entre 1,5 à 2 millions de personnes ont été touchées par l'épuration. « L'auteur se demande si le Général a libéré la France. Et, là encore, le constat est accablant : les libérateurs, ce sont les Anglo-Américains en Algérie puis en Normandie et, en Provence, l'Armée d'Afrique, débaptisée 1re Armée, à laquelle de Gaulle a retiré son chef légitime, Juin, pour la confier à de Lattre. Alors que Juin et Churchill voulaient prendre l'Allemagne à revers par l'Autriche et éviter ainsi à la fois l'avancée soviétique et la dévastation de la France, Roosevelt et De Gaulle, qui avaient chacun donné des gages à Staline, s'y opposèrent, le second craignant, dans cette hypothèse, de ne pas disposer des forces nécessaires pour prendre le pouvoir. « Ce pouvoir, pris en août 1944, sera de courte durée, la nouvelle assemblée lui est hostile : le 20 janvier 1946, il se retire. L'auteur dresse le triste bilan de ces 18 mois. Désormais en retraite à Colombey, il se voit en recours, mais il faut pour cela une situation de crise. « C'est l'affaire algérienne qui sera le déclencheur. On connaît la manifestation du 13 mai 1958 à Alger, et l'appel, malgré lui, de Salan à De Gaulle qui se déclare aussitôt "prêt à assumer les pouvoirs de la République". Il n'aura pas besoin de déclencher "l'Opération Résurrection" puisqu'il est, depuis le 3 juin, investi des pouvoirs constituants. On suit alor