Chevalier de légende... Un être exceptionnel que rien ne prédisposait à jouer un rôle sur la scène du monde, mais que les circonstances mirent au premier plan de l'actualité ; un homme de la fin du XVIIIè siècle, élevé dans l'ambiance d'alors, avec le goût du plaisir, de la danse, de la toilette, de la galanterie, des jolies femmes, mais dressé à l'effort, à la discipline, au mépris de ses aises, par neuf années de navigation - onze campagnes - sur les vaisseaux du Roy ; jeté malgré lui dans une aventure que d'avance il jugeait désespérée, il se révèle chef-né, avec des méthodes de guerre très particulières, sur lesquelles les stratèges se penchent encore, qui lui permirent de tenir tête pendant trois ans à des forces infiniment supérieures et lui valurent d'être nommé par le roi lui-même, généralissime des armées catholiques et royales... En pluviôse an III, lorsque la République est amenée à traiter avec la Vendée, d'égal à égal, c'est lui qui impose ses conditions... Cependant, la lutte reprend jusqu'à ce que, abandonné de tous, mais fidèle à son serment jusqu'au bout - "Pour mon Dieu, pour ma Religion, pour mon Roi !" - traqué, forcé dans son repaire, capturé enfin dans les bois de la Chabotterie, il tombe à Nantes, sur la place Viarmes, le 29 mars 1796...
Chevalier de légende... On serait tenté, peut-être, dans l'ambiance actuelle, en songeant à tant de fidélités déçues, à tant de sacrifices apparemment vains, de lui appliquer une autre épithète : le chevalier "perdu"...
Mais quoi, "perdu", Charette ? vaincu ? en apparence peut-être, car, en fait, c'est lui le vainqueur, le victorieux ! N'est-ce pas le triomphe de la Vendée, ou, comme on l'a dit, la victoire des vaincus, que sonnent, à l'été 1801, un lustre à peine après, les cloches de Notre-Dame qui annoncent au monde la signature du Concordat par Bonaparte ?