Une vingtaine d´opérations contre l´ennemi
5/5 Entretien avec Gilbert Sincyr
.----. Histoire de résistance et contre-espionnage du Groupe Morhange, un des plus célèbre groupes de résistants toulousain. Ce livre raconte cas par cas, une vingtaine d´opérations contre l´ennemi et ses affidés, d´après les écrits personnels ou dictés par André Fontès.
« Retour sur les grandes heures d'André Fontès, patron groupe Morhange :pied-de-nez à l'histoire officielle ? Oui »
.**.** Entretien avec Gilbert Sincyr, auteur du livre André Fontès, héros de la guerre de l'ombre
Gilbert Sincyr (1936-2014), ingénieur et historien, a servi de 1958 à 1961 en Algérie dans le commando de chasse Maurice, sous les ordres du colonel Bigeard (1 citation), puis dans le Renseignement militaire. Aux côtés du général Salan, il fit partie de ceux qui refusèrent l'abandon de leurs camarades Harkis. Écologiste convaincu, dès 1977 il rejoignait le Groupe Paul-Émile Victor et la Fondation Cousteau. Il a toujours défendu le droit des peuples à l'identité et à la culture.
Le groupe Morhange, c'était quoi ? Un maquis ? Un réseau ?
Simplement une organisation rattachée au Bureau du contre-espionnage français, dirigé d'Alger par le commandant Paul Paillole. Il s'agissait de militaires des Services spéciaux français, de la Gendarmerie, de la Sécurité intérieure, de la Police etc. Ce qui facilitait l'obtention des laissez-passer, voitures et cartes grises, uniformes et essence nécessaires aux activités. Ce groupe incluait aussi plusieurs secrétaires de l'administration lui transmettant les doubles des courriers de la police allemande et de la Gestapo. Enfin, plusieurs membres du groupe Morhange collaboraient (en apparence) officiellement avec des partis collaborationnistes, ou étaient acoquinés avec les sous-fifres de la Gestapo, ce qui leur a permis de réussir certains coups extraordinaires, telle la saisie d'une partie des archives de la Gestapo (24 hommes du groupe Morhange sont morts torturés, déportés ou assassinés par les Allemands).
À part le fait que ce groupe était rattaché aux Services Secrets, qu'avait-il de particulier ?
Ce « simple » fait n'était déjà pas banal. Mais ce qui donnait son caractère unique au Groupe Morhange, c'est que son objectif principal consistait à éliminer les traîtres et les collabos actifs, qui dénonçaient aux Allemands, le plus souvent pour de l'argent, les Français résistants. Le fondateur du groupe Morhange, l'adjudant des services secrets, Marcel Taillandier (fait Compagnon de la Libération hélas à titre posthume, car abattu par la Gestapo), s'était fixé cette mission alors qu'en 1942, ses activités de résistant avaient été dénoncées. Cette traîtrise, pour de l'argent, révulsa tellement Marcel Taillandier qu'il décida de créer un réseau destiné à éliminer les traîtres. Il choisit Morhange comme pseudo qui devint celui de tout le groupe.
André Fontès était le Chef « Action » dans l'organisation du groupe Morhange ?
Oui, bien que l'élimination de Français, quoique responsables de la torture, de la déportation et de la mort de nombreux résistants, le gênait moralement. Il n'aimait pas en parler, mais sur la fin de sa vie, il décida tout de même de confier ses souvenirs. Son souhait était qu'ils soient connus, ce à quoi je me suis employé. [ Entretien réalisé par Fabrice Dutilleul ]