Là se battent les chouans de Georges Cadoudal
4/5 Reconquête.
.----. Un personnage central : le vicomte Tanguy de Kervarec. La composition de temps et de
lieu : 1795, la France sortant de la terreur robespierriste et de l'horreur génocidaire en
Vendée, mais nullement de l'oppression dévastatrice du jacobinisme ; la Bretagne, et
surtout le Morbihan et sa presqu'île de Quiberon. Là se battent les chouans de Georges
Cadoudal, pour le roi bien sûr mais plus encore pour Dieu et pour les libertés.
L'auteur
a composé un roman dans une claire affirmation de l'exemplarité de Jean Giono dans Le
Hussard sur le toit avec Angelo pour héros, traversant les affres de la Provence dévastée
par le choléra et les soubresauts du temps, comme Tanguy va survivre à la désolation de
la révolte chouanne et de la répression républicaine.
Mais les aventures romanesques de Tanguy de Kervarec sont principalement ordonnées à
celles bien réelles de cet immense héros qu'est Cadoudal.
En définitive, un beau roman, bien construit, dans l'odeur de l'océan battant les côtes
sauvages et la fureur des embuscades et des batailles. Si la France d'aujourd'hui avait une
possibilité de création cinématographique libre, comme il en est aux États-Unis, il y
aurait là de surcroît matière à un beau film de guerre, d'amour et de foi. [ Signé : Bernard Antony dans " Reconquête ", n° 309, juin-juillet 2014 ]
« folies politiques » ?
4/5 Le Casoar .
.----. Comme l'auteur nous le précise dans la première ligne de son avant-propos, ce livre est
d'abord un « roman ». Mais un roman historique nourrit par une connaissance
approfondie des principaux ouvrages qui traitent des événements liés au débarquement
des émigrés,
royalistes en baie de Quiberon : Anne Bonnet, Jean-François Chiappe, etc.
Le héros, Tanguy, va traverser cette année 1795, connaître le chevalier de Tinténiac et,
bien sûr, le grand Cadoudal. L'histoire d'amour avec Thérèse de Moëlan est un prétexte
à centrer le récit autour du château de Talhouët. Mais en fait, ce livre a pour objet une
réflexion sur la « férocité de l'histoire » et les prises de position politiques de Tanguy
conduisent à la conclusion que la Révolution aurait pu « faire l'économie de bien des
violences, d'une guerre civile et d'une guerre européenne de vingt-cinq ans ».
Un livre
érudit, un récit passionnant et des réflexions pertinentes sur les conséquences des « folies
politiques » qui frappent toujours les faibles et les humbles. Et tout cela au pays des
« bonnets rouges ». [ Signé : Patrick du Reau (65-67) dans " Le Casoar ", n° 215, octobre 2014 ]
Quiberon : « les quatre composantes de l’opposition au régime républicain » (Pardi)
2/5 reinformation.tv
.----. Jean-Gabriel Pardi, familier du Morbihan a été nourri de l’histoire du débarquement de Quiberon. Il en tire aujourd’hui un roman, 1795, les Fossés de Penthièvre, qui nous plonge dans le soulèvement des campagnes de l’Ouest, autour de « Monsieur Georges » alias Cadoudal…
S’appuyant sur les récits d’historiens confirmés tels que Patrick Guéniffey, Anne Bernet ou Jean-François Chiappe, il emprunte à Giono le souffle de la chevauchée d’Angelo Pardi – d’où, d’ailleurs, son : « dans mon roman, c’est la violence révolutionnaire qui tient la place du choléra. » Mais Montaigne y a tout autant sa place, dont les Essais accompagnent le paquetage du héros et émaillent le texte…
Dans les fossés de Penthièvre, à l’été 1795
Les princes en émigration à Londres envoient à la fin juin, en soutien de l’insurrection chouanne, cinq régiments qui débarquent sur les plages de Carnac. Dans ce Grand Corps de la Marine Royale, figure le vicomte Tanguy de Kervarec, héros de l’aventure. Simple enseigne de marine, c’est dans cette épopée de Quiberon qu’il va faire ses armes et approfondir son analyse de la Révolution, parmi ces « jeux de l’ombre », dans cette vie clandestine où l’on s’échappe de manoir en masure, de cellier en arbre creux.. Plouay, Hennebont, Pontcallec, Auray, Plouharnel ! On entend hululer la chouette et rouler le Scorff, la nuit, sous les dolmens. Et les coups du maréchal forgeron qui ré-emmanche verticalement les faux et aiguise leur coupant… Pardi tient à redire l’Histoire. Elle n’y est pas qu’une base nécessaire à l’imaginaire plus prégnant d’une intrigue. Elle est le véritable sujet de ce roman qui mérite encore davantage, comme le suggère d’ailleurs l’auteur, le terme de « chronique ». Lui-même est là, tout près, dans l’ombre de son héros, joli prétexte à raconter ces graves et sombres années, les hauts faits comme les errements.
On entend à nouveau, par la bouche du Marquis de Pontcallec, la notification au Roi Louis XVI de sa condamnation à mort par la Convention. On ré-évoque le martyre des seize carmélites de Compiègne. Beaucoup de personnages-clés sont cités, du plus grand au plus abject. Et même ce pauvre rhinocéros de la Ménagerie Royale, ramené avec peine des Indes, que les révolutionnaires haineux massacrèrent au sabre parce qu’il avait eu le tort de divertir les enfants royaux…
Quiberon : « les quatre composantes de l’opposition au régime républicain » (Pardi)
Mais « l’affaire de Quiberon » prend toute la place qui lui revient. Événement emblématique qui concentre « les quatre composantes de l’opposition au régime républicain, tel qu’il est devenu par radicalisations successives : la révolte des campagnes, la dissidence du clergé dit « réfractaire », l’intervention militaire de régiments d’émigrés, le soutien d’une puissance étrangère. » Pardi met chez Tanguy toute la conscience qu’il aurait fallu avoir de ce grand mouvement mal ajusté, fait de bonne volonté paysanne, d’indigence militaire et aussi d’opportunisme personnel… Il en dit la raison d’être, à travers cette paysannerie « agressée dans ses modes de vie ancestraux » ; l’échec, dû en partie à la mésentente des généraux de son commandement ; et le désastre : des milliers de personnes, officiers et chouans, arrêtées, près de huit-cent passées « officiellement » par les armes – en témoigne encore le « champ des martyrs » de Brech, près d’Auray. Par-delà, c’est le procès de toute la Terreur et de sa « sinistre mécanique », de Carrier à Westermann. Quelle était cette Révolution sinon « …une fermentation parmi les boutiquiers aisés, la bourgeoisie lettrée, la basoche bavarde et quelques aristocrates inconscients, le tout agité, propagé, orchestré par ces sociétés de pensée résolument hostiles à la religion… » ? Pour Tanguy, c’est « une coterie ultra-minoritaire, parfaitement ignorante des réalités et des souhaits de la société française dans sa diversité ». Il ne comprend pas le processus de radicalisation qui s’est effectué, l’escalade de la violence qui a renoué, à travers la peur, avec « la sauvagerie primitive »… Car sa condamnation n’est pas uniforme. Il accepte et justifie le travail de la Constituante de 89 et de 90. L’abolition des privilèges, cette fameuse nuit du 4 août 89, ne le choque pas plus qu’elle ne choque le jeune prêtre réfractaire du roman. Il y revient à plusieurs reprises, en parlant de cet « absolutisme chronique » et « désuet », qu’il était bon de remettre en cause. Mais les germes de la Terreur, où faut-il aller les chercher ? La peur ne suffit sans doute pas à tout expliquer. [ Signé Marie Piloquet sur reinformation.tv le 26 décembre 2014 ]