Foi dans l’efficacité de la vérité.
5/5 Sedes sapientiae
.----. Le père Viot est à bon droit préoccupé du rayonnement de la foi sur l’organisation sociale. C’est le thème de La Révolution chrétienne : la nouvelle évangélisation, pour quoi faire ? (cf. notre recension dans Sedes Sapientiæ, n° 123). Dans le présent ouvrage, dédié à Benoît XVI, qui « a été inspiré quand il a remis à l’honneur la fête du Christ Roi » (p. 63), en la prenant pour terme de l’Année de la foi, il rappelle les fondements révélés de la royauté du Christ, et propose de revoir le concept de laïcité.
L’auteur donne une pertinente mise en perspective historique de l’encyclique de Pie XI, Quas primas, qui en 1925 institua la fête liturgique de la royauté du Christ. Il souligne son actualité et explique, textes à l’appui, que les déplacements d’accent introduits par Vatican II, ainsi que le déplacement de la date de la fête, ne remettent pas en cause l’essentiel de la doctrine de la royauté du Christ sur toutes les sociétés. « Sur le plan purement théologique, il me semble donc que Vatican II a complété Quas primas sans l’abroger, ce qui d’ailleurs n’était pas en son pouvoir » (p. 60).
On peut pourtant estimer que certains des glissements ont été abusifs (notamment le changement du texte des hymnes de la fête), et qu’ils ont été exploités contre l’engagement explicite des chrétiens en politique. Il n’en reste pas moins vrai que le Catéchisme de l’Église catholique – dont l’auteur déplore que l’on ait perdu de vue qu’il « est revêtu de l’autorité magistérielle » (p. 12) – va dans le sens d’une continuité substantielle, notamment en renvoyant à Quas primas : « Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme individuellement et socialement. […] L’Église manifeste ainsi la royauté du Christ sur toute la création et en particulier sur les sociétés humaines (cf. Léon XIII, enc. Immortale Dei; Pie XI, enc. Quas primas) » (CEC, n. 2105).
L’auteur analyse le sens de la séparation de l’Église et de l’État, et s’attache à montrer la continuité, sur le fond, de la pensée des pontifes à cet égard, de Pie VI à Jean-Paul II. Il n’hésite pas, pour éclairer la genèse et la nature de la « laïcité à la française », à citer Joseph de Maistre, le cardinal Pie et même (malheureusement sans indiquer les références) celui qui fut notre maître en politique, Louis Daménie. Le père Viot, au début et à la fin de son travail, donne d’éclairantes précisions sur le cheminement de sa pensée : « Depuis de nombreuses années, y compris celles vécues dans le Protestantisme luthérien et la Franc-Maçonnerie, je me suis attaqué au laïcisme sans remettre en cause la laïcité inscrite dans l’article 1er de la Constitution de 1958, celle de la 5e République. Aujourd’hui je suis contraint d’aller plus loin. Pourquoi ? Parce qu’on peut malheureusement parler d’un dérapage laïciste calculé par la présidence socialiste, à cause du mépris, pour ne pas dire de la haine des religions. […] Je pose alors la question sans détour : allons-nous célébrer le Christ Roi dans le but qu’assigne Pie XI (à mon avis appuyé par Vatican II) dans le sens du paragraphe 21 de Quas primas ? […] Je sais parfaitement que je remets ici en cause la laïcité de l’État. Mais, après tout, depuis quand pareille notion est-elle dogme révélé de l’Église? » (pp. 16-17 et 61).
Les réflexions doctrinales et politiques de l’auteur sur le sens de la fête du Christ Roi, tenant compte de la vraie liberté des consciences, se complètent par des propositions pratiques. « Mes convictions catholiques quant à la signification du Christ Roi des nations et de l’univers m’obligent à dire qu’il faut réviser dans sa forme la loi de séparation de 1905 » (p. 65). Cette révision viserait la situation des chrétiens de diverses dénominations et des juifs. Mais, en concédant des salles de prière sans minaret aux musulmans, on mettrait à part le cas de l’islam, à cause de son statut particulier de confusion politico-religieuse et de l’absence de réciprocité dans les droits de culte reconnus en terre d’Islam aux non-musulmans.
On regrettera une inexactitude sur la notion de « désobéissance » : elle ne saurait être « une manifestation sur terre du Royaume » (p. 59). Lorsque des chrétiens n’exécutent pas un ordre illégitime de l’autorité temporelle, c’est précisément qu’il n’y a pas « matière à obéissance ». L’obéissance est une vertu qui vise seulement l’exécution de l’ordre d’une autorité légitime, donné dans le cadre de sa juridiction, lorsqu’il n’est pas clairement opposé à celui d’une autorité supérieure. Un ordre opposé aux commandements de Dieu n’appelle aucune « désobéissance » : il n’existe pas comme tel. On notera aussi que les citations, des pontifes notamment, sont souvent données d’après des ouvrages d’auteurs, et non avec les références originales. Mais ces discrètes réserves n’enlèvent pas le grand intérêt de cette brochure, qui vaut la peine d’être lue. Remettant en perspective de longue durée des problèmes très actuels, elle est instructive. Elle est aussi originale et courageuse, par ses propositions pratiques et sa foi dans l’efficacité de la vérité.
[ Signé : Fr. L.-M. de Blignières dans Sedes sapientiæ, n° 126, 31e année/4, hiver 2013 ]
Règne du Christ dans la vie publique
4/5 La Nef .
.----. Peut-être ne s’est-on pas assez interrogé sur la signification de l’achèvement, en la fête du Christ Roi, de l’année de la Foi décidée par Benoît XVI : au-delà de la perspective eschatologique, c’est d’abord celle d’une nouvelle évangélisation supposant d’ores et déjà la royauté du Christ ici-bas. C’est cette perspective, mise en exergue par l’encyclique Quas Primas du pape Pie XI en 1925 instituant la fête du Christ Roi, qu’a voulu souligner notre pape émérite.
À la lumière des récents événements politiques de notre pays, et après un rapide historique des rapports entre l’Église et l’État en France, le Père M. Viot nous fait (re)découvrir la substance de ce texte complété par les différents apports de Vatican II sur ce thème. Il signe ici une précieuse introduction à la compréhension fondamentale du nécessaire règne du Christ dans la vie publique, règne ignoré voire bafoué, et évoque opportunément cette mise en garde : « Les chefs de la société civile se rappelleront, de leur côté, le dernier jugement, où le Christ accusera ceux qui l’ont expulsé de la vie publique, mais aussi ceux qui l’ont dédaigneusement mis de côté ou ignoré, et punira de pareils outrages par les châtiments les plus terribles » (Quas Primas, 21). [ Anne-Françoise Thès dans : La Nef, n° 258, avril 2014 ]
Un éclairage salutaire .
3/5 Guillaume d'Alançon .
L'étude de l'abbé Michel Viot, ancien évêque luthérien, qui plus est ancien franc-maçon, est l'occasion pour chacun d'entreprendre un voyage au cœur de la foi en Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, « descendit de caelis » récitons-nous au Credo. Dans l'exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, Paul VI écrit que l'Église existe pour évangéliser.
C'est bien de l'extension du règne de Dieu sur les cœurs, les âmes et les sociétés qu’il s'agit. Rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est Dieu signifie que tout ce qui relève de César doit être aussi rapporté à Dieu. Il est donc heureux que soit proposé à chacun de découvrir le sens profond de la royauté sociale du Christ. Si le Christ est la pierre d'angle de l'Église, sa royauté en est la clef de voûte. Il ne s'agit point ici de passéisme, au contraire, nous sommes en face d'une question brûlante d'actualité : si le roi de la paix était vraiment prince en notre pays, cela se saurait…
« Instaurare omnia in Christo », telle était la devise de saint Pie X. Plus d'un siècle plus tard, le pape François ose écrire : « Peut-être aurions-nous peur d'appeler Dieu notre Dieu ? Peut-être est-ce nous qui ne le confessons pas comme tel dans notre vie publique, qui ne proposerions pas la grandeur de la vie en commun qu'il rend possible ? La foi éclaire la vie en société » (encyclique Lumen Fidei, § 55).
Cet ouvrage de l'abbé Michel Viot, vicaire épiscopal dans le diocèse de Blois, apporte bien un éclairage salutaire. ( Guillame d'Alançon dans le numéro 43 - décembre 2013 de " Notre Eglise, diocèse de Bayonne, Lescar ET Oloron ).